
2,3 milliards d’euros en plus. C’est le montant qu’espèrent récupérer Amélie de Montchalin et Catherine Vautrin, respectivement ministres des Finances et du Travail et de la Santé, en 2026. Dans un document révélé par les Echos ce lundi 4 août, elles détaillent les 20 articles du futur projet de loi contre la fraude fiscale et sociale, qui sera examiné à la rentrée à la représentation nationale. Parmi les mesures, une cible radioactive : les arrêts maladie, dont l’explosion inquiète le gouvernement depuis plusieurs années.
On aurait d’ailleurs pu s’y attendre : lors de l’annonce du budget 2026 à la mi-juillet, François Bayrou martelait déjà la nécessité de s’attaquer aux arrêts de longue durée (plus de 18 mois), soulignant que la moitié de ceux contrôlés ne seraient plus médicalement justifiés. Catherine Vautrin semble donc bien décidée à remonter à la source du problème : les médecins jugés un peu trop généreux lors de la prescription d’arrêt maladie. Le gouvernement prévoit ainsi de renforcer la fameuse procédure de «mise sous obligation».
Mais de quoi parle-t-on exactement ? «La Sécurité sociale dispose de référentiels fixant le nombre d’arrêts maladie qu’un médecin est censé prescrire. S’il dépasse ces seuils, il est rapidement suivi», explique René-Pierre Labarrière, président départemental de l’Ordre des médecins de Haute-Savoie. La Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) a alors deux options : placer le médecin sous accord préalable, et ainsi valider tous les arrêts maladie prescrits par ce dernier. Le praticien peut aussi faire l’objet d’une mise sous objectif, «ce qui l'oblige à faire baisser son pourcentage d’arrêts», sous peine de sanction disciplinaire, prévient le médecin.
Vers une modification des référentiels concernant le nombre d’arrêts maladie délivrés ?
Interrogé sur la forme que pourrait prendre ce «renforcement de la mise sous obligation», l’entourage de la ministre Catherine Vautrin botte en touche : «A ce stade, le projet de loi est en construction et doit faire l’objet de l’avis du Conseil d’Etat», nous explique le ministère du Travail et de la Santé. Mais selon le Conseil national de l’ordre des médecins, «le gouvernement souhaite certainement changer la méthode d’évaluation de ces médecins qui prescrivent trop», tout en précisant que l’institution n’a pas encore été sollicitée pour plancher sur le sujet.
Dans les coulisses, l’exécutif pourrait donc songer à affiner la comparaison entre praticiens, en tenant compte de critères aujourd’hui trop peu pris en compte : l’âge, le sexe ou encore le profil socio-professionnel des patients… L’objectif ? Eviter les injustices. Car logiquement, un médecin qui exerce dans un bassin industriel délivre plus d’arrêts qu’un confrère installé dans une zone où la patientèle, largement retraitée, n’a pas besoin d’arrêts maladie. «Il serait donc intéressant de mieux comparer les activités des médecins qui ont une patientèle similaire», insiste René-Pierre Labarrière.
Eviter les injustices, certes. Mais si cela peut aussi permettre de mieux cibler les médecins trop généreux – que la CPAM chiffre à un millier environ selon les critères actuels –, et à les inciter à ralentir la cadence, alors tant mieux ! Sans en dire plus, le ministère réaffirme cependant son ambition : «Lutter contre les arrêts de travail injustifiés et permettre à ceux qui en ont médicalement besoin d’y accéder tout en assurant la pérennité de notre système social.» Pour savoir comment, il faudra attendre la rentrée, date à laquelle le ministère nous donne rendez-vous pour plus de précisions.



















