
A peine 0,7% de croissance en 2025 : les dernières prévisions annoncées par la Banque de France ont de quoi inquiéter. D’autant que les droits de douane, dont Donald Trump précisera ce soir l’ampleur, pourraient encore plus déstabiliser nos entreprises exportatrices. Raison de plus pour réagir, selon Amir Reza-Tofighi, le nouveau président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME, deuxième organisation patronale derrière le Medef). Pour lui, il faut résister aux assauts commerciaux de Trump comme de la Chine. Mais aussi redonner confiance aux entrepreneurs, en simplifiant, et en allégeant leur charge fiscale.
Capital : Craignez-vous une guerre douanière, alors que Donald Trump s’apprête à taxer les produits européens ?
Amir Reza-Tofighi : Nous ne devons pas nous laisser faire. Dans ce monde imprévisible, nous devons protéger nos secteurs qui vont être pénalisés. Il faut sortir de cette Europe naïve, qui veut toujours se conformer aux règles, quand plus personne ne les respecte. Il faut une Europe capable de rivaliser avec les Américains et les Chinois, qui se battent pour leur propre intérêt. Il suffit de constater le dumping fiscal et social d’un Temu ou d’un Shein, dont les volumes pèsent déjà un quart des colis livrés en France par La Poste ! Face à cette déferlante, il faut supprimer l’exemption douanière sur les envois de moins de 150 euros, comme les Américains l’ont fait. Et pouvoir sanctionner. Comme on ne peut pas tout contrôler à nos frontières, appliquons la règle de l’échantillonnage : si, sur un échantillon de 200 000 colis, on a trouvé 50% d’irrégularités, alors extrapolons cette statistique à l’ensemble des colis reçus, et appliquons des amendes. C’est un sujet porté par Amélie de Montchalin, la Ministre des comptes publics, qui est en charge des Douanes, et que nous soutenons.
Quelles mesures prendre, alors que la croissance faiblit, et que les défaillances d’entreprises augmentent ?
Alors que de nombreuses décisions ont été bloquées ces derniers mois, et que la politique de l’offre a été remise en cause, le vrai sujet aujourd’hui, c’est celui du budget 2026, et du message qu'il enverra. S’il donne le sentiment qu'on va continuer à taxer les entreprises, ce sera terrible car les patrons vont baisser leurs investissements, et les PME seront alors pénalisées. Il faut redonner confiance aux entreprises. Et pour cela montrer qu’il y a une prise de conscience sur l’urgence de réduire la dette publique.
La simplification administrative pourrait aussi aider ?
Simplifier ce n’est pas juste alléger, c’est libérer. Mais ce n'est jamais simple de simplifier. Il faut s’inspirer de ce que l’on fait en entreprise, un travail collaboratif, selon le principe de l’amélioration continue. Ce que je propose, ce sont des plans d’action avec l’Etat, tous les mois ou tous les deux mois, qui permettraient de déterminer, parmi les normes en place, celles qui servent encore, et celles qui ne servent plus à rien. Pour les nouvelles normes à adopter, nous préconisons le « test PME » : avant de voter une loi, il s’agira de la tester grandeur nature auprès de plusieurs TPE-PME. Les parlementaires resteront libres de leur vote, mais ils auront au moins un rapport, pour éclairer leurs choix. On pourrait aussi imaginer que toute nouvelle norme ne soit mise en place que pour une durée déterminée, et prolongée que si son utilité est avérée (cette mesure n’a finalement pas été retenue à l’Assemblée nationale, fin mars, lors de l’examen en commission de la loi sur la simplification économique, NDLR).
Considérez-vous comme déloyale la concurrence des auto-entrepreneurs ?
Il faut d’abord se réjouir d'avoir, avec ce statut, créé un engouement pour l'entrepreneuriat. Mais il faut aussi en faire le bilan, notamment dans le bâtiment, où certains se plaignent de distorsions de concurrence. Dans ce secteur qui exige compétences, certifications et assurances, il apparaît normal de s’interroger sur les franchises de TVA dont bénéficient les auto-entrepreneurs. J'aimerais aussi qu'on ait une réflexion globale sur ce statut, en se demandant s’il s’agit d’un mode de travail pérenne, ou d’une porte d’entrée vers l’entrepreneuriat. Dans le premier cas, on reste dans une logique de complément d'activité. Mais dans le second, il faut réussir à créer une passerelle vers le régime général, celui d’une entreprise normale. C’est aussi une question sociale et sociétale. Parce que sinon, dans 20 ans, on va se rendre compte que ces travailleurs n’ont pas assez cotisé, et qu’on a fabriqué des retraités pauvres.
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