
En deux ans, Rheinmetall est devenu le symbole du «rallye de la défense» en Bourse en Europe, porté par la hausse des budgets militaires de l’OTAN. Mais la dynamique récente «révèle plusieurs fragilités que les investisseurs doivent prendre en compte», avertit Thomas Jaquet, directeur de Freedom24 France (lié à Freedom Finance Europe Ltd). Il y a d’abord indéniablement le risque géopolitique, alors que «le facteur paix pèse déjà», relève l'expert. Les discussions autour d’un scénario de résolution du conflit en Ukraine ont fait reculer toutes les actions du secteur de la défense, en Bourse.
L’indice actions européen de la défense a inscrit un plus bas et Rheinmetall a figuré parmi les plus fortes baisses, en Bourse. Le marché actions anticipe qu’une désescalade «pourrait réduire la demande d’armes et effacer rapidement la prime liée à la guerre. Par ailleurs, un risque de valorisation pèse sur les actions Rheinmetall, qui se paient 76 à 77 fois les profits estimés (sur 12 mois), contre environ 31 pour le secteur. Une valorisation inhabituelle pour une entreprise industrielle, même en forte croissance», fait valoir Thomas Jaquet. Les attentes sont presque parfaites : la moindre déception sur les contrats ou le contexte géopolitique pourrait entraîner une correction importante, selon lui.
Les actions Rheinmetall ont-elles du potentiel en Bourse selon l’analyse financière ?
Rheinmetall est dépendant de l'Europe. La part de l’Ukraine dans ses revenus diminue. La croissance du groupe «dépend désormais des programmes européens, mais ceux-ci restent soumis aux cycles politiques et à la pression réglementaire, notamment ESG», selon l’expert, pour qui «sans nouveaux contrats majeurs, le récit d’hypercroissance de Rheinmetall pourrait s’essouffler». Le ralentissement de la demande et la concurrence accrue en Europe pèsent sur les marges Rheinmetall, alors que les budgets de certains pays limitent les nouvelles commandes.
À court terme, le risque de correction baissière «reste élevé sur les actions Rheinmetall», selon Thomas Jaquet. Le cours de Bourse a déjà perdu plus de 25% depuis octobre. Pourtant, d’après l’expert, les fondamentaux de Rheinmetall, en forte croissance, sont solides, entre un carnet de commandes de 63,8-64 milliards d’euros (+23%), un chiffre d’affaires de 7,5 milliards (+20% sur neuf mois), une activité défense en hausse de 28% et marge de 13-14%. L’entreprise confirme ses prévisions et la visibilité s’étend jusqu’en 2027.
Malgré un free cash-flow (flux de trésorerie généré par l’exploitation, diminué des investissements consentis) négatif (du fait de la hausse des stocks) et des commandes trimestrielles plus faibles, le consensus des analystes financiers reste à «acheter/conserver» avec un objectif moyen à 2 240 euros, soit environ un potentiel d’appréciation théorique de 50%.
Quelles perspectives pour les actions Rheinmetall, selon l’analyse technique ?
Du point de vue de l’analyse technique (analyse graphique et mathématique de l'évolution du cours de Bourse, qui sert à élaborer des scénarios sur les perspectives d’une action ou d’un autre actif financier) l’action Rheinmetall évolue désormais dans un large bandeau de consolidation (intervalle de fluctuation des cours de Bourse) entre 1 430 et 2 000 euros. «Une cassure sous 1430 euros (un enfoncement confirmé de ce niveau de cours, NDLR) ouvrirait la voie à un repli vers 900-1 000 euros. Pour retrouver une dynamique haussière, il faudrait repasser durablement au-dessus de 1 750-1 800 euros, puis franchir les 2000 euros», juge l’expert.
«Une paix rapide et une baisse des budgets européens pourraient provoquer une nouvelle contraction des multiples. Mais le marché considère toujours que le cycle de réarmement de l’OTAN restera durable. Rheinmetall traverse ainsi une phase de recalibrage : risque élevé à court terme, potentiel structurel intact. Les actions Rheinmetall apparaissent comme une opportunité d’entrée progressive plutôt qu’un achat agressif», déclare Thomas Jaquet.




















