
Le Conseil d’Etat a tranché. Depuis le 1er janvier 2024, les salariés en CDD ou en mission d’intérim doivent réfléchir à deux fois avant de décliner une offre de CDI. Pour cause, la loi prévoit désormais qu’un demandeur d’emploi refusant deux offres raisonnables d’emploi (ORE) dans les 12 mois suivant la fin de son contrat peut se voir privé de son allocation d’aide de retour à l’emploi (ARE). Mais pour être considérée comme raisonnable, précisons que cette offre d’emploi doit remplir quelques critères très précis, parmi lesquels concerner le même emploi ou un poste similaire, offrir une rémunération au moins équivalente ou encore avoir une durée de travail identique, par exemple.
De son côté, l’employeur a l’obligation de faire son offre en bonne et due forme. Elle doit être envoyée par un moyen qui prouve la date d’envoi et de réception (courrier recommandé, remise en main propre contre signature, ou tout autre procédé équivalent). L’employeur doit également préciser le délai de réponse accordé au salarié. Et si ce dernier décline la proposition, ou ne répond tout simplement pas ? L’entreprise a un mois pour signaler ce refus à France Travail. De son côté, l’ex-Pôle emploi informera alors l’intéressé des conséquences : la possibilité de perdre ses allocations chômage.
Cette suppression des allocations chômage «créerait des situations de travail forcé ou obligatoire»
Un dispositif qui a logiquement fait bondir les syndicats, à l’image de la CGT, Solidaires, FSU et Force ouvrière. Les quatre organisations ont saisi le Conseil d’Etat pour demander l’annulation du décret d’application du 28 décembre 2023, ainsi que de l’arrêté du 3 janvier 2024 fixant les modalités d’information de France Travail. Leurs griefs ? Une procédure jugée inéquitable par les organisations de défense des travailleurs. Pour cause, aucun délai minimal de réponse n’était garanti et l’employeur n’était pas tenu d’informer le salarié des conséquences de son refus, c’est-à-dire qu’il pourrait perdre ses allocations chômage. De plus, les critères permettant de prouver qu’un poste est «identique ou similaire» restaient flous. Bref, pour les syndicats, le décret serait truffé d’irrégularités et «créerait des situations de travail forcé ou obligatoire».
Des arguments balayés d’un revers de main par la justice française, donc. Dans sa décision du 18 juillet, la plus haute juridiction de l’ordre administratif a estimé qu’aucune de ces critiques ne justifiait d’annuler le décret ou l’arrêté. Pour cette dernière, l’obligation faite à l’employeur d’informer France Travail en cas de refus n’a, en elle-même, aucun effet direct sur les droits du salarié. Seul l’opérateur public reste compétent pour décider, après examen, si les allocations seront accordées ou non. Le Conseil d’Etat rappelle aussi que seules les propositions de CDI identiques ou similaires à l’emploi précédent peuvent être prises en compte. Et qu’un délai raisonnable doit toujours être accordé au salarié pour répondre, son silence valant alors refus. Enfin, le salarié reste libre de contester toute décision de France Travail devant le juge. Les salariés en fin de contrat sont donc prévenus : deux refus peuvent définitivement leur coûter cher.


















