Si vous achetez un appartement ou une maison à partir du 1er décembre 2025, afin de le louer nu et sur une longue durée, vous disposerez d’un sacré avantage fiscal à condition que le statut du bailleur privé entre bien en vigueur en 2026. Chaque année, à partir de l’an prochain et durant 20 ans, vous pourrez en effet déduire de vos revenus locatifs un amortissement égal à 5% de la valeur du bien acheté s’il est neuf, ou 4% s’il est ancien et que vous l’avez considérablement rénové.

La ministre du Logement ne ménage pas ses efforts pour convaincre ses collègues du gouvernement, notamment Eric Lombard (Economie) et Amélie de Montchalin (Comptes publics), d’inscrire dans le projet de loi de finances pour 2026 ce fameux statut fiscal du bailleur privé, réclamé par les associations de propriétaires depuis une dizaine d’années. Pour emporter l’assentiment de Bercy, à la recherche de 40 milliards d’euros d’économies, Valérie Létard dispose d’un argument massue : le gain de ce statut du bailleur privé pour les finances publiques est estimé par la mission parlementaire Daubresse-Cosson à 500 millions d’euros en 2026, à 1,1 milliard en 2027, puis à 1,9 milliard d’euros par an jusqu’en 2036.

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Des prévisions de construction de logements contestées

Publié ce mardi 8 juillet par le cabinet Asterès, pour le compte du Collectif des experts comptables de la location meublée (CECLM), un autre rapport se montre moins enthousiaste. Il faut dire que, si le statut du bailleur privé voit le jour, la location meublée de longue durée perdra une bonne partie de son avantage sur la location nue puisqu’elle bénéficie déjà de ce mécanisme d’amortissement. Selon le premier scénario échafaudé par Asterès, la mise en oeuvre du statut du bailleur privé se traduirait par un écart négatif entre recettes et dépenses fiscales de -148 millions d’euros en 2026, -297 millions en 2027, -445 millions en 2028 puis de -594 millions en 2029. Dans son second scénario, cette mesure serait en revanche bénéfique pour les finances publiques, mais à hauteur de seulement 65 millions d’euros en 2026, 395 millions en 2027, 676 millions en 2028 et 909 millions en 2029.

Pourquoi un tel écart avec les prévisions du rapport du sénateur Marc-Philippe Daubresse et du député Mickaël Cosson ? Tous deux estiment que le coût fiscal de l’amortissement, pour l’Etat, sera aisément compensé par les recettes de TVA et de frais de notaire perçus par le même Etat sur les ventes de logements neufs et anciens, ventes qui devraient être dopées par le statut du bailleur privé. Mais «les sous-jacents de ces projections (de rebond des ventes) ne sont pas explicités. L’hypothèse de la construction de 85 000 logements par an n’est pas étayée par des arguments solides», objecte Asterès.

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Des estimations avec le concours de 4 inspecteurs généraux

Le cabinet relève par ailleurs que le rapport Daubresse-Cosson «semble considérer que les investisseurs ne bénéficient de l’amortissement que durant un an après leur acquisition», alors qu’ils sont censés en profiter pendant 20 ans. D’où une «sous-estimation du coût de la mesure». Asterès n’est pas non plus d’accord avec le coût de cette mesure par investisseur, qu’il chiffre à 3 300 euros en moyenne par an, contre seulement 2 700 euros dans le rapport Daubresse-Cosson.

Contacté par Capital, Marc-Philippe Daubresse ne souhaite pas «s’exprimer plus sur le sujet». Idem pour le ministère du Logement. Mais, selon une source proche du dossier, «tous les calculs et estimations du rapport Daubresse-Cosson ont été faits avec le concours de quatre inspecteurs généraux, dont un de Bercy». Et «ce type d’estimations de constructions futures de logements, Marc-Philippe Daubresse l’a fait en 2005 dans le cadre du plan Borloo, lorsqu’il était secrétaire d’Etat au logement, puis en 2008, en travaillant sur l’amortissement Scellier !», rappelle la même source. Une autre source se veut plus philosophe, estimant que le CECLM «est dans son rôle et que son second scénario est tout de même positif pour les finances publiques…»

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