Tardivement vendredi soir, l’Assemblée nationale a voté un amendement au projet de loi de finances pour 2026, inspiré par le député des Pyrénees-Atlantiques Jean-Paul Mattéi, qui substitue à l’impôt sur la fortune immobilière un impôt sur la fortune improductive. Ainsi, l’IFI succède à l’IFI…mais cela change tout, et au passage c’est un vent de  révolution qui souffle sur la fiscalité immobilière. Petit rappel douloureux d’abord. En 2016, le candidat à l’élection présidentielle Emmanuel Macron promet d’abolir l’impôt sur la fortune et, élu, il tient parole. À ce détail près qu’il ne le tue pas, mais en fait évoluer l’assiette, désormais seulement fondée sur les actifs de nature immobilière, quelle qu’en soit la destination. Pour le dire d’un mot, le chef de l’État stigmatise la pierre comme improductive entre tous les placements. Ce geste est le premier d’une longue série de décisions peu favorables au logement, et en particulier au logement locatif, accompagnées de discours désignant d’un doigt accusateur les propriétaires investisseurs comme des rentiers.

Jamais de palinodie ni de remords publics. Les ministres successifs en charge du logement ont dû inscrire leur action dans ce contexte de désamour de l’Élysée envers l’immobilier, notamment résidentiel. Ils y ont eu quelque mérite et ce qu’ils ont pu faire, en particulier dans le champ budgétaire, a été remporté de haute lutte. Ce que vient à cet égard d’accomplir le député Mattéi en obtenant le vote majoritaire de son amendement, contre le gouvernement, ressemble à rien moins qu’une réhabilitation idéologique de l’immobilier résidentiel. En effet, la disposition définit avec précision et de façon exhaustive les actifs productifs, exclus de l’assiette du nouvel impôt, et l’immobilier locatif d’habitation en fait clairement partie. On se rappellera que le rapport Daubresse-Cosson commandé par Valérie Létard alors ministre du logement suggérait cette évolution.

Une victoire pas définitivement acquise

L’amendement ne donne pas sans condition l’absolution aux logements visés. Le contrat de location
doit avoir une durée minimum d’une année, ce qui condamne les locations meublées de courte durée -sauf s’il s’agit de la location d’une résidence principale pendant les 120 jours autorisés par an,
éventuellement abaissés à 90 jours par la commune concernée. Par ailleurs, le loyer doit être intermédiaire, c’est-à-dire inférieur au marché, et les logements doivent être vertueux au plan écologique, classés À, B, C ou D dans l’échelle du diagnostic de performance énergétique. Enfin, et ce point avait déjà fait l’objet de débats nourris lorsque l’impôt sur la fortune immobilière a été voté, il a été fait à la résidence principale un sort particulier : alors que l’IFI autorisait un abattement de 30% sur la valeur de cet actif, l’impôt sur la fortune improductive admet une exonération du bien à hauteur maximum d’un million d’euros. D’autre part, alors que l’impôt sur l’immobilier était progressif, allant de 0,5% de la valeur estimée du patrimoine à 1,5%, l’amendement Mattéi instaure un taux unifiée d’1%. Quant au seuil de déclenchement de l’impôt sur la fortune improductive, il reste d’1,3 million d’euros.

Cette victoire n’est pas définitivement acquise. Le Sénat peut la conforter, et les chances sont importantes, mais aussi en modifier les modalités. Une probable commission mixte paritaire pourrait à
la fin porter préjudice à la mesure. Et on sait également quel aléa pèse sur le vote définitif du projet de
loi de finances pour 2026. Un budget décidé par ordonnances ou encore une loi spéciale, comme l’an dernier, voilà des scenarii possibles, sinon probables, et à ce jeu-là, que restera-t-il de l’amendement
Mattéi ? N’empêche qu’il sera bien difficile au gouvernement de ne pas prendre en considération une
mesure qui a rallié les suffrages d’une grande partie du bloc central, du groupe socialiste et du groupe
du rassemblement national…

2025, une grande année pour le logement ?

En outre, il est urgent que cet amendement, qui corrige le regard méprisant sur le logement locatif, soit suivi de la création du statut fiscal qui reconnaîtra à son tour la productivité de l’investissement immobilier résidentiel : il est normal que le ménage qui consacre sa capacité d’endettement à l’achat
d’un logement pour le louer soit assimilé à un entrepreneur, dont l’usure de l’outil de service soit comptablement admise. À ce compte-là, la relance de l’investissement locatif privé sera assurée, au
bénéfice des Français qui cherchent à se loger et peinent à y parvenir, comme au bénéfice de l’État et
des collectivités locales, qui encaisseront TVA et droits de mutation à titre onéreux. Si ce second progrès est acté dans le budget pour 2026, 2025 aura été pour le logement une grande année.