
Pour un propriétaire bailleur, un locataire âgé peut présenter l’avantage de revenus stables, du fait de sa pension de retraite, et d’un mode de vie a priori tranquille. Mais si le locataire est âgé de plus de 65 ans et dispose de ressources modestes, il est protégé par la loi, ce qui complique la résiliation du bail.
Monsieur et madame N en ont fait l’expérience. Selon un arrêt de la Cour de cassation du 2 octobre dernier, repéré par le cabinet d’avocats Adonis, ils signifient son congé à leur locataire, madame Y, le 11 avril 2019, au motif de la reprise du logement afin d’y habiter eux-mêmes à partir du 3 février 2021. Un congé donné dans les règles de l’art, avec un motif tout ce qu’il y a de plus légitime et un délai largement supérieur au minimum de 6 mois requis.
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Protéger le locataire âgé en respectant le droit du propriétaire
Mais madame Y, qui occupe le logement depuis plusieurs années, refuse de partir à moins d’être relogée par ses propriétaires, invoquant la protection spécifique accordée aux locataires de plus de 65 ans disposant de faibles ressources. L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs prévoit en effet que, «lorsque le locataire est âgé de plus de 65 ans et que ses ressources annuelles sont inférieures à un certain plafond, le bailleur ne peut donner congé qu’à la condition de lui proposer un (autre) logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités».
Un dispositif qui «vise à protéger les locataires âgés et modestes contre une expulsion brutale, tout en respectant le droit du bailleur à récupérer son bien», explique Adonis Avocats.
3 000 euros à verser aux propriétaires
Madame Y affirme que c’est son revenu net, et non son revenu brut, qui doit être comparé au plafond de ressources fixé par arrêté. Convaincus que c’est bien le revenu brut qui doit être pris en considération, ses propriétaires, monsieur et madame N, portent l’affaire en justice. En première instance comme en appel, les juges leur donnent raison, considérant en effet que ce sont les revenus bruts déclarés à l’administration fiscale, avant tout abattement, qui doivent servir de référence. «Selon les juges, il s’agit de la seule lecture cohérente avec la finalité sociale de la loi : éviter les effets d’optimisation ou de déduction fiscale susceptibles de fausser l’évaluation des ressources réelles», décrypte le cabinet d’avocats.
Le revenu brut de la locataire dépassant le plafond, la cour d’appel de Paris valide le congé pour reprise du logement et ordonne l’expulsion de madame Y. Celle-ci se pourvoit alors en cassation. Sans succès : «Les ressources à prendre en compte pour l’application de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 s’entendent des revenus annuels déclarés à l’administration fiscale avant tout abattement ou déduction», confirme à son tour la Cour de cassation. Monsieur et madame N sont donc dans leur bon droit en reprenant leur bien sans proposer de relogement à la locataire. Comme la cour d’appel de Paris, la Cour de cassation valide le congé pour reprise, ordonne l’expulsion de madame Y et la condamne à payer 3 000 euros à ses propriétaires au titre des frais de justice engagés.




















