Encore un terrible revers pour le numérique made in France. La Commission nationale informatique et liberté (Cnil) vient d’autoriser Microsoft à stocker les données de santé des Français, à des fins de recherche médicale. Baptisé EMC2, ce vaste entrepôt numérique sera hébergé sur l’infrastructure informatique décentralisée du géant américain, le fameux cloud, pour une durée d’au moins trois ans. Cette plateforme, qui sera alimentée en informations personnelles (sexe, mois et année de naissance, commune de résidence du patient) et médicales (soins, remboursements de consultation, parcours hospitaliers…), vise à faciliter le travail des chercheurs, en particulier pour étudier les effets à long terme des traitements médicaux.

Pétition anti-Microsoft : un millier de signatures récoltées en 24 h

La France projette depuis des années de tirer profit des données de son système de santé, et nos scientifiques commençaient sérieusement à s’impatienter, craignant d’accumuler trop de retard dans la course mondiale à l’innovation. Sans évacuer le risque que des données aussi sensibles et stratégiques pour notre pays puissent être exfiltrées vers les Etats-Unis, avec la complicité de Microsoft, la Cnil estime donc avoir fait un choix pragmatique en confiant les clés de ce cyber-entrepôt au géant mondial du cloud. « Parmi les opérateurs de cloud français ou européens, aucun prestataire potentiel ne propose d'offre d'hébergement répondant aux exigences techniques et fonctionnelles du projet », justifie en substance la Commission.

Depuis qu’elle a été officialisée, hier, son annonce a provoqué une levée de bouclier des acteurs français du cloud. « Cette décision est clairement de nature à éveiller des soupçons quant à l’intégrité des conditions dans lesquelles elle a été prise, autant que sur la capacité de notre pays à assurer la sauvegarde, au propre comme au figuré, de nos données de santé », s’insurge Thomas Fauré, le président de Whaller, une startup française du secteur dans sa pétition adressée à la présidente de la Cnil Marie-Laure Denis.

Intitulée « Sortons nos données de santé de chez Microsoft », elle a déjà enregistré plus d’un millier de signatures depuis qu’elle a été publiée hier. En fin d’année, déjà, les Français OVHCloud, Numspot et Cloud Temple avaient pointé certaines bizarreries dans la procédure de consultation initiée par la Délégation au numérique rattachée au ministère de la Santé (DNS). « En décembre, rappelle en substance Thomas Waller, ces entreprises participantes avaient signalé des difficultés lors de la consultation, dont des changements fréquents dans les exigences techniques et une pression intense, laissant entendre que les dés étaient pipés ab initio et que l’intention de la consultation était de confirmer un choix déjà bien établi ».

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