
Torse plaqué contre son bolide, Marc Marquez dépasse les 330 kilomètre/heure sur le circuit de Buriram, en Thaïlande. En ce début mars, impossible de rater le pilote espagnol, qui frôle l’asphalte brûlant, et roule vêtu de rouge depuis son ralliement à l’écurie Ducati, trois mois plus tôt. «Le transfert du siècle», considère-t-on dans le milieu de la MotoGP, le sportif ayant déjà été huit fois champion du monde. Avec cet atout, la marque italienne rêve déjà d’empocher le même titre, pour la quatrième année consécutive.
C’est en effet en 2022 que Ducati a mis fin à une malédiction de quinze ans, et réussi à arracher ce trophée aux japonais Honda, Suzuki ou Yamaha, habitués à dominer le circuit sportif. De quoi aussi aiguillonner ces géants dans les concessions de deux-roues, même si, sur le circuit commercial, Ducati fait cette fois figure de challenger. Avec 54 495 modèles vendus en 2024 (soit 6% de moins qu’en 2023), le constructeur reste en effet très loin des volumes de Honda, qui domine le marché mondial avec 19,6 millions d’unités. Mais aussi de son principal rival européen, Piaggio, qui a commercialisé 481 600 exemplaires à travers le monde. Cela s’explique facilement : au contraire de ce compatriote transalpin, célèbre pour ses Vespa, Ducati ne fait que dans les grosses cylindrées. Celles aux dimensions sculpturales, dont le moteur et le design crient la fougue italienne.
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Ducati : un fleuron italien de la moto au coeur de la Motor Valley
Toutes les motos que la marque vend en Europe sont assemblées à Bologne, en Emilie-Romagne. Les prestigieux locataires de la région, comme Ferrari, Maserati, Lamborghini ou Pagani, ont valu à ce coin d’Italie d’être rebaptisé la «Motor Valley». Avec 1500 employés, l’usine Ducati évoque toutefois plus l’atelier familial, que la forteresse industrielle. Sur les chaînes d’assemblage, où l’on croise des fils de mécaniciens biberonnés à l’automobile, les opérateurs s’activent en prévision des beaux jours. Près de 60% de l’activité se concentre en effet de janvier à juin, car c’est durant l’été que les clients veulent tailler la route.
«Nous ne nous préoccupons pas trop des volumes», assure Claudio Domenicali, PDG de Ducati, un enfant de cette Motor Valley, qui a également fait ses classes à Bologne. Si la production annuelle plafonne depuis longtemps autour des 50 000 unités, c’est que cela préserve la désirabilité de ces engins haut de gamme. Il faut ainsi patienter plusieurs mois avant d’enfourcher sa moto. Et prévoir en moyenne un chèque de 21 000 euros, soit «20% au-dessus de la moyenne du marché», chiffre Claudio Domenicali.
Les circuits de course, un laboratoire pour Ducati
Pour justifier ces tarifs, le PDG pointe vers les circuits : la division sportive de l’entreprise, Ducati Corse, fait office de laboratoire à destination des motos vendues au grand public. Le dirigeant suit donc attentivement les résultats des courses, qui sont autant d’arguments de vente auprès de clients passionnés de mécanique. «Sur une Ducati, on retrouve les technologies qu’on voyait en compétition il y a seulement deux ou trois ans. Aucun autre constructeur ne propose cela !», décrit Patrice Brillouet, président du Ducati Club de France, lui-même propriétaire de plusieurs engins de la marque.
Dans cette association, ils sont 1500 à rouler comme lui pour le plaisir, et à s’appeler «Ducatistes». «Celui qui achète une Ducati n’achète pas seulement une moto. L’identification à la marque est très forte», se félicite Claudio Domenicali. Cela n’empêche pas le PDG de chercher des relais de croissance, alors que son chiffre d’affaires a fondu de presque 6% sur 2024, à 1,003 milliard d’euros. Après l’asphalte, la terre : c’est sur un nouveau terrain que se lance Ducati, le motocross. «La clientèle des motos tout-terrain est plus jeune», souligne le PDG. Cette activité a aussi pour avantage de compenser la saisonnalité des ventes : les pilotes de motocross roulent un peu plus l’hiver, contrairement aux adeptes des «routières».
Fidèle à ses méthodes, l’entreprise a décidé de faire ses preuves en compétition. Elle va donc disputer son premier championnat du monde de motocross en 2025, et commercialiser en parallèle la Desmo450 MX, dès juin. Avec de grandes ambitions, puisque ce segment devrait peser 15% de l’activité d’ici 2030. En parallèle, l’entreprise ne néglige pas son électrification, et fournit déjà en exclusivité les engins à batterie engagés sur le championnat du monde MotoGP. Mais l’italien n’est sans doute qu’au début du chemin : dans ce secteur soumis à une moindre pression réglementaire, les ventes de motos électriques n’ont représenté que 4,5% du marché français en 2024, quand ce type de propulsion pesait déjà 17% des volumes de voitures particulières.
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