L’essentiel

Un budget pour éviter la chute. Sébastien Lecornu a présenté mardi 14 octobre un budget 2026 alliant hausse de la fiscalité et maîtrise des dépenses pour redresser des comptes publics fragilisés. Il s’est engagé à suspendre la réforme des retraites et à laisser «le dernier mot» au Parlement, renonçant à l’article 49.3 pour éviter la censure.

Adoptés en Conseil des ministres, le projet de loi de finances (PLF) et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) seront examinés avant le 31 décembre. Récemment reconduit, le Premier ministre jouait sa survie politique sur la suspension de la réforme des retraites exigée par les socialistes. D’un coût estimé à 400 millions d’euros en 2026 et 1,8 milliard en 2027, la mesure devra «être compensée par des économies», a prévenu Sébastien Lecornu. Cette décision lui a toutefois permis d’échapper aux deux motions de censure déposées par le RN et LFI, rejetées ce jeudi 16 octobre.

Le direct

Budget 2026 : la bataille parlementaire est lancée

La commission des Finances de l'Assemblée nationale a commencé lundi à examiner le projet de budget de l'Etat pour 2026, dans un climat d'antagonisme politique exacerbé et des délais contraints. Après l'échec de la censure du gouvernement minoritaire de Sébastien Lecornu, les groupes politiques ont l'intention d'amender en profondeur un projet de budget jugé insatisfaisant, préfigurant des échanges électriques entre un camp présidentiel fracturé, une gauche traversée de tensions et une extrême droite favorable à une union des droites. Vendredi 18 octobre, une autre donnée s'est ajoutée au tableau : l'agence de notation S&P a annoncé abaisser d'un cran la note de la France, invoquant une incertitude «élevée» sur les finances publiques, et ce «malgré la présentation cette semaine du projet de budget 2026».

Pour l'année prochaine, le gouvernement ambitionne un effort global d'une trentaine de milliards d'euros, entre nouveaux prélèvements (14 milliards) et économies de dépenses (17 milliards) afin de ramener le déficit public à 4,7% du produit intérieur brut (PIB). Il accepterait d'assouplir cet objectif jusqu'à «sous 5%» pour permettre des compromis. De lundi à mercredi soir, la commission des Finances s'est penchée sur la première partie du projet de loi de finances (PLF), celle consacrée aux recettes, pour une arrivée prévue vendredi dans l'hémicycle et un vote solennel le 4 novembre. Le gouvernement a promis de laisser le dernier mot au Parlement, renonçant à l'article 49.3 de la Constitution, qui permet l'adoption d'un texte sans vote. Les élus disposent en tout de 70 jours pour examiner le PLF à compter du dépôt du texte à l'Assemblée nationale le 14 octobre, soit jusqu'au 23 décembre, avec une promulgation avant le 31 décembre. Plus de 1 000 amendements ont été déposés par les députés, avant d'être examinés.

De son côté, la commission des Affaires sociales débattra à partir de lundi 27 octobre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), après l'audition mardi des ministres concernés. Le texte contient des économies tous azimuts : gel des pensions, reste à charge supérieur sur les médicaments et les consultations ou contribution patronale rehaussée sur les titres restaurant et chèques vacances. C'est en novembre que le gouvernement soumettra un amendement de suspension de la réforme des retraites.

Budget 2026 : les niches fiscales dans le viseur du gouvernement

Sans surprise, l’exécutif veut faire le ménage parmi les 474 niches fiscales existantes. Selon le budget 2026 présenté mardi par Sébastien Lecornu, 23 d’entre elles devraient être supprimées prochainement.

Budget 2026 : le gouvernement s’attaque aux dépassements d’honoraires des médecins

Début octobre, le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) alertait sur la hausse continue des dépassements d’honoraires. Le gouvernement de Sébastien Lecornu prévoit désormais d’instaurer une nouvelle taxe visant les médecins spécialistes du secteur 2.

Budget 2026 : cette hausse de taxe qui risque de faire grimper les prix des carburants

Mauvaise nouvelle pour de nombreux automobilistes : le projet de loi de finances 2026, présenté mardi par le gouvernement, prévoit une hausse progressive sur trois ans des taxes appliquées au superéthanol-E85. Une réduction des avantages fiscaux qui pourrait aussi entraîner une augmentation des prix du diesel et de l’essence à la pompe.

27 milliards d’euros nécessaires pour stabiliser la dette française, selon le CAE

Dans une note publiée ce jeudi 16 octobre, le Conseil d’analyse économique (CAE) estime qu’un effort total de 112 milliards d’euros sera indispensable pour éviter une envolée de la dette publique et de ses coûts, dont 27 milliards dès 2026.

Sébastien Lecornu se dit «au travail», satisfait que «les débats puissent démarrer»

«Il fallait que les débats puissent démarrer», a réagi jeudi le Premier ministre Sébastien Lecornu, souhaitant se mettre «au travail» après avoir résisté aux deux premières motions de censure visant son gouvernement. «Vous voyez bien la gravité de la situation dans laquelle on est. Vous voyez bien que c'est difficile. Il fallait que les débats puissent démarrer. Ils vont démarrer», a dit le chef du gouvernement, interrogé par BFMTV alors qu'il quittait l'Assemblée nationale à pied en direction de Matignon après l'échec des motions de censure déposées par La France insoumise et le Rassemblement national.

La motion de censure du Rassemblement national également rejetée

Tout comme la motion de censure portée par LFI, celle du Rassemblement national a été, sans surprise, largement rejetée à son tour. Elle n'a rassemblé que 144 voix, loin des 289 requises pour faire tomber le gouvernement.

La motion de censure de La France insoumise rejetée

Menacé, le gouvernement Lecornu 2 a finalement échappé à une première censure ce jeudi 16 octobre. La motion déposée par la France insoumise a été rejetée. 271 bulletins ont été comptabilisés pour censurer le gouvernement, la majorité requise étant fixée à 289. Dans la foulée, LFI a annoncé le dépôt d'une nouvelle motion de destitution du président de la République.

Eric Ciotti (UDR) appelle à censurer le gouvernement «sans état d’âme»

A la tribune, Eric Ciotti, président du groupe Union des droites pour la République, a pris la parole pour dénoncer «un gouvernement du renoncement» et a affirmé qu’il le censurerait «sans état d’âme», qualifiant l’exécutif de «gouvernement fantoche».Il a également lancé qu’il s’agissait d’un «gouvernement otage du parti socialiste».

«La démocratie ce n’est pas le vacarme permanent» pour Paul Christophe (Horizons)

Paul Christophe, président du groupe Horizons et Indépendants, a affirmé que «la démocratie ce n’est pas le vacarme permanent». «Chez Horizons, nous faisons le choix de la stabilité et de l’intérêt général. Le débat parlementaire, nous le souhaitons. Avec les députés de mon groupe, nous ne voterons pas n’importe quoi. Nous comptons utiliser le débat budgétaire pour défendre nos convictions», a-t-il ajouté.

La suspension de la réforme des retraites n’est qu’un «retardement cosmétique» selon Léa Balage El Mariky (Les Ecologistes)

L'écologiste Léa Balage El Mariky a pris la parole en soulignant que «le vote d’une censure n’est jamais un geste anodin». «Vous ne méritez pas la confiance monsieur le Premier ministre. On ne censure pas par plaisir mais parce que votre gouvernement ne répond pas à ce que l’on considère comme juste», a-t-elle déclaré. Les écologistes considèrent que la suspension de la réforme des retraites n’est qu’un «retardement cosmétique», et qu’autoriser Sébastien Lecornu à poursuivre à Matignon reviendrait à «accepter la droitisation de nos politiques publiques».

Jean-Didier Berger (LR) appelle les députés à «faire preuve d'humilité»

Le député Les Républicains (LR) des Hauts-de-Seine et ancien maire de Clamart, Jean-Didier Berger, a déclaré que son groupe ne comptait «pas censurer le gouvernement», invoquant «l’intérêt supérieur de la nation». Il a appelé les députés du Palais Bourbon à «faire preuve d’humilité» face à la situation politique actuelle. L’élu a évoqué «la liberté d’action» qui «engage» l’ensemble des membres de l’Assemblée nationale, tout en reconnaissant «des points de désaccords importants» entre Les Républicains et le gouvernement, notamment sur le budget. Toutefois, a-t-il affirmé, «l’intérêt supérieur de la nation passe avant les intérêts des partis», et Les Républicains ne «vont donc pas censurer le gouvernement».

Laurent Baumel (PS) invite Sébastien Lecornu à «de nouvelles concessions»

Le député socialiste Laurent Baumel a appelé le Premier ministre à effectuer «de nouvelles concessions» lors des débats budgétaires, précisant que la «non-censure» du Parti socialiste jeudi n’était «en aucun cas un pacte de non-censure». Le renoncement au 49.3 «ne vous exonère pas de votre responsabilité de faire de nouvelles concessions sur la trajectoire financière, sur la justice sociale, sur le pouvoir d’achat, si vous voulez, si nous voulons que la France ait un budget et un gouvernement à la fin de cette année», a-t-il déclaré à l’Assemblée nationale, au cours des débats sur les deux motions de censure. Concernant la suspension de la réforme des retraites annoncée par Sébastien Lecornu, Laurent Baumel a averti : «Il n’y aura pas d’entourloupe ou de ruse procédurale. Vous êtes le garant qu’à la fin du processus, la suspension devienne une réalité juridique. La pérennité même de votre gouvernement est désormais liée à cet engagement.»

Un «moment de vérité» entre «ordre républicain» et «désordre», avertit Sébastien Lecornu

Le Premier ministre Sébastien Lecornu, confronté jeudi à deux motions de censure à l’Assemblée nationale, a qualifié cette séquence de «moment de vérité» entre «ordre républicain» et «désordre». «C’est évidemment le moment de vérité. Est-ce que l’on souhaite l’ordre républicain avec des débats qui ont lieu à l’Assemblée nationale ou est-ce qu’on souhaite le désordre ?», a-t-il lancé, en s’adressant directement aux parlementaires de La France insoumise et du Rassemblement national, auteurs des motions de censure. «Ne prenez pas en otage le budget de la nation et le budget de la Sécurité sociale», a ajouté le chef du gouvernement, alors que les députés doivent entamer la semaine prochaine l’examen du projet de loi de finances pour 2026.

Marine Le Pen (RN) attend la dissolution avec une «impatience croissante»

A l’Assemblée nationale, Marine Le Pen a dénoncé «l’année noire fiscale» que représentera selon elle «l’année blanche» inscrite dans le budget du gouvernement, affirmant attendre «la dissolution avec une impatience croissante». Ce budget constitue «l’acte ultime, nous l’espérons, d’un système politique à bout de souffle», a déclaré la présidente des députés Rassemblement national, en défendant la motion de censure déposée par son groupe contre le gouvernement de Sébastien Lecornu. Elle a également fustigé «l’insondable sottise des postures» susceptibles, selon elle, de le «sauver». Evoquant la «poursuite du matraquage fiscal» avec 19 milliards d’impôts supplémentaires, le «gel du barème» de l’impôt sur le revenu qui rendrait imposables. «200 000 foyers» supplémentaires, ainsi que la «poursuite de la gabegie des dépenses publiques», l’«absence totale d’efforts sur l’immigration» et sur «l’aide médicale d’Etat», Marine Le Pen a estimé que ce budget «est un véritable musée de toutes les horreurs coincées depuis des années dans les tiroirs de Bercy».

La «suspension» de la réforme des retraites «n'est qu'un leurre», lance Aurélie Trouvé (LFI)

La députée La France insoumise Aurélie Trouvé a dénoncé la suspension annoncée de la réforme des retraites, la qualifiant de «leurre, tromperie, subterfuge», lors du lancement du débat sur la motion de censure visant le gouvernement de Sébastien Lecornu. «Vous tous qui avez été élus pour abroger la réforme des retraites, allez-vous vraiment vous laisser abuser par cette aumône en trompe-l’œil ?», a-t-elle lancé, alors que les socialistes ont indiqué qu’ils ne voteraient pas la censure. Un «saccage budgétaire aura lieu si nous ne censurons pas», a encore affirmé la députée insoumise.

Journée d'action des retraités le 6 novembre, annonce la CGT

La secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, a appelé ce jeudi à la mobilisation contre le projet de budget 2026, précisant que celle-ci débuterait le 6 novembre par une journée d’action des retraités. «Ce budget est très dangereux. Il faut absolument le modifier en profondeur» et «il va falloir se mobiliser», a déclaré la dirigeante syndicale sur France 2. Elle a ajouté que «la mobilisation va commencer dès le 6 novembre prochain, avec les retraités qui organisent une journée d’action», estimant que «la pilule est particulièrement violente pour les retraités». Selon elle, ces derniers seront «les premières victimes de l’explosion des frais de santé», car «ils ont le plus besoin de se soigner». Sophie Binet a également pointé «la désindexation des pensions prévue pour 2026», inscrite «dans le marbre», et une forte hausse des impôts liée à «la remise en cause des abattements». «Si l’on cumule ces trois mesures, on voit que les retraités sont dans le viseur. Tout cela parce qu’on refuse de taxer les plus riches et d’affronter les multinationales et les rentiers», a-t-elle dénoncé. Interrogée sur la possibilité d’une nouvelle journée nationale de grève interprofessionnelle, Sophie Binet a indiqué que «ce sont des choses qui se débattent et se travaillent dans la durée», tout en affirmant que «pour la CGT, l’heure est à la mobilisation».

A peine installé, Sébastien Lecornu affronte deux motions de censure

Un dernier obstacle avant d'entamer l'examen du budget : deux motions de censure contre le gouvernement de Sébastien Lecornu, l'une de LFI et l'autre du RN, seront débattues par les députés jeudi matin, et devraient être rejetées, dans un scrutin serré, faute de soutien du PS. Le Parti socialiste a pris sa décision après avoir obtenu mardi satisfaction sur plusieurs revendications clés, dont l'annonce par le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, de la suspension de la réforme des retraites. Un débat commun aux deux motions a début à 9 heures dans l'hémicycle ce jeudi 16 octobre, et devrait durer environ deux heures trente. Le scrutin sera ensuite ouvert pour trente minutes sur une motion, puis l'autre. Si la gauche ne soutiendra pas la motion du RN, celle de la France insoumise devrait recueillir les voix de l'extrême droite, ainsi que des députés écologistes et communistes. Manqueraient alors environ une vingtaine de députés pour atteindre la majorité (289 voix) qui ferait tomber le gouvernement, tout juste nommé dimanche. «Je pense qu'il manque une poignée de voix et que la sagesse peut revenir à certains», a estimé mardi Marine Le Pen, qui défendra la motion de son groupe et de ses alliés ciottistes. Leur texte défend la nécessité d'une dissolution pour «sortir» le pays «de l'impasse». Combien de députés franchiront le pas en s'affranchissant de la consigne de leur parti ?

Le gouvernement soumettra «en novembre» la suspension de la réforme des retraites

Le gouvernement soumettra en novembre un amendement de suspension de la réforme des retraites, a affirmé mercredi Sébastien Lecornu, le patron des députés PS Boris Vallaud avertissant que, «peu importe le véhicule», «sans suspension il n'y pas de gouvernement». «Il faut que le gouvernement dépose un amendement au projet de loi de finances pour la Sécurité sociale dès le mois de novembre», a déclaré le Premier ministre à l'Assemblée, lors de sa première séance de questions au gouvernement. Le gouvernement propose de mettre en pause jusqu'à la présidentielle le recul progressif à 64 ans de l'âge de départ, ainsi que la durée de cotisation, et a obtenu en échange, à ce stade, une non-censure des socialistes. «Ce sera au Parlement de le décider, et donc à chacune et chacun, ici, dans la plus grande clarté, de porter ses convictions», a complété le Premier ministre. Son intervention a mis fin à un doute sur la procédure. A l'Assemblée mardi, la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin avait affirmé que la suspension ferait l'objet d'un «amendement» au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Mais le ministre du Travail Jean-Pierre Farandou avait, un peu plus tard, semé le doute en évoquant une loi, sans dire si elle serait distincte.

Le RN ne votera pas la taxe Zucman proposée par le PS

Interrogée ce mercredi sur France Inter quant à la possibilité de voter l'amendement que portera le Parti socialiste pour réintroduire la taxe Zucman, Marine Le Pen a affirmé que son parti, le Rassemblement national «votera évidemment contre». Pourquoi ? Car selon elle, «cette taxe visera les biens professionnels», contrairement à sa proposition d'impôt sur la fortune financière.