S’il n’y a pas eu de fumée blanche, François Bayrou s’est tout de même dit «impressionné» ce jeudi par les avancées obtenues dans les discussions sur la réforme des retraites. «Je suis impressionné par les progrès, et je crois que vous allez en avoir la preuve, qui ont été faits depuis quatre mois. Il a pu y avoir des moments de tension, parfois d'agacement. (...) Les représentants des salariés et des entreprises ont chacun pris en compte les attentes de leurs interlocuteurs et ont ensemble pris en compte ce qui est plus important encore, l'intérêt général», a déclaré le Premier ministre au début de sa conférence de presse, à Matignon. Il a précisé que la négociation avait permis des «avancées» mais qu'aucun accord n'avait été formellement signé.

François Bayrou a estimé qu’un «compromis» entre syndicats et patronat, engagés depuis quatre mois dans les négociations sur les retraites, était «à portée de main» concernant la pénibilité, principal point de blocage entre les partenaires sociaux. En dressant le bilan des discussions, qui n’ont pas abouti à un accord global, il a souligné la volonté d’«améliorer sensiblement et immédiatement les retraites des femmes (...) ayant eu des enfants». Il a également fait savoir qu’un compromis avait été trouvé pour abaisser l’âge du départ à la retraite à taux plein, de 67 ans à 66 ans et demi. Même en l’absence d’accord formel, François Bayrou s’est dit disposé à intégrer certaines «dispositions de compromis» dans le prochain budget de la Sécurité sociale.

Ce qu'il faut retenir de la conférence de presse de François Bayrou sur les retraites

Avant de détailler les avancées obtenues, François Bayrou a rappelé les «objectifs» fixés au conclave : garantir l’avenir du système de retraites par répartition en rétablissant son équilibre à l’horizon 2030. «C'était la seule condition que j'avais mise», a-t-il insisté. Il a également évoqué l’amélioration du taux d’emploi des seniors comme un autre objectif, ainsi qu’une volonté de renforcer la justice du système, en citant notamment les pensions des femmes et la prise en compte de la pénibilité. Ne pas augmenter le coût du travail faisait aussi partie des priorités, de même que l’ambition de sortir le débat sur les retraites de ses tensions habituelles, notamment intergénérationnelles. François Bayrou a en outre évoqué la question de la gouvernance, soulignant que tout ne devait pas nécessairement relever du champ politique, et prenant pour exemple celle des retraites complémentaires du secteur privé. «Il se peut que la démocratie politique donne un coup de pouce à la démocratie sociale», a-t-il également glissé.

Age légal de départ à la retraite

Quant aux avancées issues du conclave, François Bayrou a affirmé que l’ensemble des participants avaient accepté le principe du retour à l’équilibre. Il a également salué comme une avancée le fait, «et ce n'était pas forcément facile», que tous aient accepté de ne pas remettre en question l’âge légal de départ à 64 ans. Il a aussi souligné l’abaissement de l’âge de départ sans décote, passant de 67 à 66 ans et demi.

Retraite des femmes

Parmi les avancées mentionnées figure l’amélioration des retraites des femmes, avec un calcul des pensions basé non plus sur les 25 meilleures années, mais sur les 24 pour celles ayant un enfant, ou sur les 23 pour deux enfants ou plus. Autre mesure en faveur des femmes : la prise en compte de deux trimestres de majoration de la durée d’assurance par enfant pour les départs anticipés au titre des carrières longues.

Pénibilité

Le Premier ministre a ensuite énuméré les demandes portées par les syndicats, en particulier sur la pénibilité. Il a indiqué que la demande d’intégrer des droits pour les travailleurs exposés à certaines situations aujourd’hui non couvertes avait été acceptée. Concernant leur dernière exigence sur les volets «prévention» et «réparation» de la pénibilité, François Bayrou a reconnu un accord sur le premier mais un échec sur le second. «Sur ce point, une recherche d'accord est indispensable. Mais je suis persuadé qu'un chemin existe», a-t-il insisté.

Sur le volet financier, François Bayrou a salué deux accords : l’un sur la pénibilité avec une mobilisation de 500 millions d’euros via la branche ATMP (accidents du travail et maladies professionnelles), l’autre sur une rationalisation du cumul emploi-retraite, qui pourrait générer 500 millions d’euros supplémentaires. «Le point qui reste à éclaircir pour boucler le financement des mesures de justice et de retour à l’équilibre porte sur 400 millions d’euros», a-t-il assuré, se disant «persuadé» qu’un «chemin nouveau» existe.

S’agissant de ce désaccord sur le financement restant, en particulier sur les départs anticipés liés à la pénibilité, sujet central depuis plusieurs semaines, François Bayrou a indiqué avoir demandé aux partenaires sociaux de reprendre les discussions pendant deux ou trois semaines. Si aucun accord n’est trouvé, il a de nouveau affirmé qu’il prendrait ses «responsabilités» et trancherait, en intégrant des mesures dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

Désindexation des retraites et carrières longues

Interrogé sur une éventuelle désindexation des retraites, option présente dans le relevé de conclusions et soutenue par syndicats et patronat, François Bayrou a botté en touche. Il a renvoyé la décision à ses annonces budgétaires prévues pour mi-juillet, tout en précisant qu’il ne souhaitait pas «stigmatiser» une catégorie particulière de la population. Autre sujet resté en suspens : le débat sensible autour du resserrement du dispositif des carrières longues. Interrogé à ce propos, François Bayrou a une nouvelle fois renvoyé aux discussions à venir entre les partenaires sociaux.