
Alors que l'abaissement du seuil d’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) semble bientôt être de l'histoire ancienne - les députés ayant voté à l'unanimité son abrogation le 2 juin dernier, c’est une toute autre réforme qui plane désormais sur la tête des indépendants : la généralisation de la facture électronique pour l’ensemble des entreprises françaises. Objectif du gouvernement : «Réduire la fraude, et ainsi récupérer 8 à 10 milliards d’euros par an», détaille Jean-Guilhem Darré, délégué général du Syndicat des indépendants (SDI). Un montant colossal, qui lui paraît cependant «tout à fait atteignable».
A partir du 1er septembre 2026, exit l’éditeur de texte pour émettre ses factures, donc. Les grandes entreprises et celles de taille intermédiaire (ETI) seront les premières à devoir se conformer à cette directive. Une contrainte toute relative, puisque «la plupart d’entre elles se sont déjà mises à la facturation électronique», reconnaît le représentant syndical. Les TPE, PME et auto-entreprises, elles, peuvent souffler encore un peu. Ce n’est qu’en septembre 2027 qu’elles devront émettre leurs factures via des plateformes de dématérialisation partenaires (PDP), agréées par l’Etat. Si Bercy a bien publié une liste de ces portails, celle-ci n’a rien de définitif : «Il s’agit d’une liste transitoire, aucune de ces interfaces n’est immatriculée définitivement», précise Jean-Guilhem Darré. Une prudence qui pourrait s’expliquer par le possible report de cette e-facturation, dans le cadre de la loi sur la simplification de la vie économique, dont le texte est examiné à l’Assemblée nationale à partir du mardi 8 avril.
Report ou non, les petits auto-entrepreneurs ne crachent pas sur le sursis d’un an qui leur est déjà accordé. Car pour les entreprises de moins de 10 salariés, la mise en marche vers la facturation électronique semble plus difficile : un patron sur deux (45%) déclare ne pas être prêt à ce changement, «le plus souvent par manque de temps», ajoute le délégué général du SDI. Pour preuve, 85% de ces petits indépendants ignorent encore combien cette réforme va leur coûter, d’après le baromètre trimestriel du syndicat, publié début avril. Il faut dire que le dispositif repose non pas sur une infrastructure publique (comme il était pourtant prévu jusqu’en octobre 2024), mais sur des plateformes privées, donc payantes.
Une tarification par tranches
Le montant de l’addition ? Variable, selon le volume de factures émises chaque mois, «vraisemblablement à l’aide d’un système de tranches tarifaires», prédit Jean-Guilhem Darré. D’après lui, il faudrait compter «au moins 50 euros par mois pour les plus petits émetteurs». A cela, ajoutez «les potentiels frais de traitement facturés par les comptables et les commissions bancaires liées à cette mise en conformité», et vous obtenez une facture annuelle qui pourrait très facilement dépasser les 600 euros. Un montant loin d’être anodin, car «entre 25 000 et 85 000 euros de chiffre d’affaires par an [seuil actuel d’exemption de la TVA pour les activités commerciales et d’hébergement, NDLR], c’est souvent là que les indépendants arrivent à gagner 1 000 à 1 200 euros par mois. Si on leur ponctionne 600 euros de plus pour ce changement obligatoire, cela met en péril le régime d’auto-entrepreneuriat en lui-même», alerte le SDI.




















