
Combien de temps le nouveau ministre du logement, Vincent Jeanbrun, nommé ce dimanche 12 octobre, restera-t-elle ou restera-t-il en poste? Il est difficile de répondre à cette question, mais en tout cas sa mission première sera de défendre un budget, écrit par le Premier ministre avant la composition du gouvernement, a minima. Le chef du gouvernement compte sur le parlement pour amender le texte, que l’exécutif lui-même peut enrichir ou corriger pendant toute la durée de l’examen à l’Assemblée nationale et au Sénat. Idéalement, le projet de loi de finances pour 2026 sera voté avant la fin de l’année 2025. Il fera nécessairement courir au Premier ministre un risque de censure, et là est la première échéance du mandat de tous les ministres. C’est par conséquent d’abord une mission budgétaire qui attend le ministre du logement, mais il devra aussi faire aboutir des évolutions juridiques en préparation.
Sur les deux champs, le financier et le civil, quelle feuille de route souhaitable? Stabiliser et adapter. Ne pas vouloir marquer d’une empreinte indélébile son passage au ministère, dans une période où le secteur est fragilisé et troublé. Prolonger ou ancrer ce qui marche et qui est à l’origine d’un début de reprise dans quelques domaines, reprendre les intentions de bon sens que Valérie Létard avait exprimées. Les illustrations viennent immédiatement. Le prêt à taux zéro élargi à tout le territoire et à la maison individuelle est favorisé le redémarrage de la construction de maisons et a redonné un peu de souffle à la promotion, aidant les ménages primo-accédants à amorcer leur parcours résidentiel. La mesure sur les donations, effective depuis septembre dernier, doit être connue et utilisée. Les droits de mutation à titre onéreux ne doivent plus augmenter et l’exclusion des primo-accédants doit être maintenue.
Le logement doit prendre sa part de la résorption du déficit public
Le projet d'amortissement pour les investisseurs dans le neuf et dans l’ancien avec travaux doit voir le jour : il est ce qui manque pour que l’offre locative se déploie et que les programmes de promotion redémarrent, les bailleurs permettant le taux de pré-commercialisation minimum conditionnant le financement des opérations par les banques. Le budget de MaPrimeRenov doit être maintenu à un niveau correct, avec une éradication de la fraude. Une moindre réduction du loyer de solidarité pour les organismes HLM doit leur redonner l’oxygène pour construire et rénover. Sans doute tout cela en concédant une diminution du budget global du logement, qui doit prendre sa part de la résorption du déficit public : si les marchés portaient sur nous un regard insatisfait après l’élaboration de la loi de finances, les taux d’intérêt monteraient et l’immobilier en serait la victime la plus atteinte. De cette responsabilité, le logement ne saurait s’exonérer, fût-ce pour son propre sort.
Enfin, les textes attendus doivent paraître sans délai et sans modification : ils ont fait l’objet de concertations longues et sont prêts, qu’il s’agisse du décret sur la formation des collaborateurs de la transaction et de la gestion, ou de la commission de contrôle de ces activités. La proposition de loi relative aux travaux en copropriété, exonérant les bailleurs d’interdiction de louer jusqu’à la réalisation de la rénovation énergétique votée, et donnant aussi les moyens aux banquiers de s’engager dans le prêt collectif, doit être sans délai inscrite à l’ordre du jour et aboutir. Adapter ce qui doit l’être, ce sont deux efforts à accomplir. S’inspirer des lois spéciales pour la construction du village olympique pour raccourcir les circuits de décision dans le domaine de l’urbanisme, mais pas seulement: la relation entre bailleur et locataire peut être fluidifiée et sécurisée, sans multiplier les contraintes pour les parties. La liste des charges récupérables mérite d’être actualisée, comme le contrat type de syndic.
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Urgent que les plus hauts dignitaires de ce pays se ressaisissent
Et puis renoncer aux tracasseries des acteurs lorsque le marché ne l’exige pas : la proposition de loi visant à lutter contre les pannes des ascenseurs est excessive et de nature à enchérir les coûts pour les copropriétaires ou les propriétaires uniques ; le bouleversement de l’équilibre économique entre les parties dans les baux commerciaux, contenu dans le projet de loi de simplification, est malvenu et générateur d’enchérissement des loyers au détriment des preneurs, sous couvert de leur rendre du pouvoir d’achat.
Enfin, un autre défi pour le nouveau ministre consiste à savoir rassurer les acteurs d’une filière qui se retrouve moins que toutes les autres dans la politique du temps court et de l’agitation. Le logement et les autres actifs immobiliers s’inscrivent dans le temps long de la construction, de la rénovation, de la détention, de l’occupation, de la transmission. Les à-coups, les saccades, les coups de tête ou de menton, abîment le secteur, et c’est la vie des Français qui en pâtit d’abord, avec des difficultés historiques pour se loger selon ses besoins, puis les rentrées fiscales pour l’État et les collectivités, et l’emploi en bout de chaîne. La feuille de route du ministre est élémentaire. Comme tout ce qui renvoie à des considérations fondamentales, elle est exigeante. Parce que la période incline davantage à l’agitation qu’à l’action, et à la superficialité plus qu’à l’essentiel. Il est urgent à cet égard que les plus hauts dignitaires de ce pays se ressaisissent.



















