
Le colossal patrimoine immobilier de l’Etat est mis à contribution dans le plan dévoilé le 15 juillet par le Premier ministre pour trouver près de 44 milliards d’euros d’économies, alors que le pays croule sous 3 300 milliards de dettes. «Avec près de 74 milliards d’euros d’actifs immobiliers, l’État pourrait alléger ses comptes», approuve le réseau d’agents immobiliers Expertimo dans un communiqué. Tout en regrettant que «l’Etat vende mal, peu, ou trop tard». Un reproche que François Bayrou ne renierait pas, lui qui souligne que «l’Etat dispose de plusieurs centaines de milliards d’euros de patrimoine immobilier, qu’il doit mieux maîtriser».
Pour Expertimo, la difficulté de l’Etat à valoriser ses actifs immobiliers est illustrée de façon «flagrante» par le cas de l’Hôtel Mezzara, situé dans le XVIe arrondissement de Paris. Ce bijou de l’Art nouveau, classé monument historique, avait été construit en 1910 par Hector Guimard, architecte des fameuses entrées du métro parisien surmontées de verrières et d’entourages en fonte aux formes végétales peints en vert. Propriété de l’Etat depuis 1956 mais déclaré d’inutilité au service public il y a 10 ans, après le départ des internes du lycée Jean-Zay, qu’il abritait, l’Hôtel Mezzara est demeuré vacant jusqu’au mois dernier. Ce qui «révèle les limites d’un système public inadapté aux règles du marché. Trop lent, trop rigide, sans stratégie claire, l’État peine à valoriser ses actifs, même les plus emblématiques», juge Expertimo.
Immobilier : François Bayrou s'attaque au colossal patrimoine «improductif» de l'Etat
Les ventes immobilières de l’Etat au plus bas en 2024
De premières tentatives de vente, en 2018, se sont soldées par un échec, rappelle Expertimo. Idem pour les appels à projets lancés ensuite. Agnès Weil, mandataire chez Expertimo, discerne «un problème de méthode, d’angle d’attaque, de narration (des qualités) du bien». Une solution vient enfin d’être trouvée, l’Etat consentant un bail emphytéotique (de très longue durée) de 50 ans à l’entrepreneur Fabien Choné et à l’association Le Cercle Guimard, a annoncé cette dernière le 29 juin. Avec l’appui de la Banque des territoires (groupe Caisse des dépôts), ce tandem transformera l’hôtel particulier en musée Guimard.
«Le cas Mezzara n’est pas isolé», souligne Agnès Weil, rappelant «qu’en 2024, les ventes du parc immobilier de l’État ont atteint un plancher historique, avec 549 cessions seulement, pour 222 millions d’euros de recettes, loin des 500 millions atteints quelques années plus tôt». Pour l’experte, «l’appareil administratif semble inadapté aux exigences d’un marché devenu plus rapide, plus segmenté, plus exigeant. L’État n’est pas un opérateur immobilier. Et il persiste à ignorer les logiques du marché, surtout sur les biens atypiques».
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Création d’une foncière publique
«À l’heure où l’État cherche à rationaliser ses dépenses, il est temps de professionnaliser la gestion de son patrimoine», poursuit-elle. Et de prêcher logiquement pour sa paroisse : «Cela suppose de faire appel à ceux dont c’est le métier. Les professionnels de la vente haut de gamme ont les outils, les réseaux et les récits adaptés pour faire d’un bien dormant un actif vivant». Le Premier ministre vient justement d’annoncer «la création d'une société foncière pour réduire, gérer, rendre utile le patrimoine public improductif, par exemple pour financer la recherche». Une foncière publique, toutefois.




















