Niches fiscales, dépenses de l’Etat, gel du barème de l’impôt sur le revenu… Sébastien Lecornu a présenté mardi 14 octobre un budget 2026 combinant hausse de la fiscalité et maîtrise des dépenses lors de son discours de politique générale devant l’Assemblée nationale. Mais parmi toutes les mesures, aucune ne concerne la taxe Zucman (impôt plancher de 2 % des ultra-riches dont le patrimoine dépasse les 100 millions d’euros), que réclamaient la gauche et son créateur. A la place, le nouveau gouvernement prévoit une taxe sur le patrimoine financier des holdings familiales, qui devrait là aussi atteindre 2%.

Selon un document consulté par l’AFP et le Huff Post, cette taxe «vise à faire échec aux stratégies de contournement de l’impôt par la thésaurisation de revenus non distribués dans des sociétés, ces revenus échappant ainsi à l’impôt». Elle est inspirée de certains pays voisins, peut-on lire également. Mais son rendement attendu représenterait seulement 1 à 1,5 milliard d’euros, contre 15 à 20 milliards annoncés par Gabriel Zucman, même si les chiffres sont débattus depuis. De quoi donc mettre en colère l’économiste. Sur le réseau social X, il s’emporte : «Tout a été fait pour épargner Bernard Arnault et les milliardaires français.»

«Toute la fortune des holdings» exonérée ?

Selon lui, le texte porté parle gouvernement fait tout pour «défendre les privilèges fiscaux des ultra-riches» et au lieu de «faire échec aux stratégies de contournement de l'impôt» comme il est précisé, il les «préserverait en les démultipliant». Et Gabriel Zucman va plus loin : cette taxe exonérerait «toute la fortune des holdings» la rendant donc inopérante : «La taxe ne s’applique pas aux titres de participations : si une holding détient des actions LVMH, ceux-ci sont exonérés d’impôts», décrit-il, avant de lister les autres dispositifs : «Pas plus aux investissements dans des fonds de capital investissement, aux placements dans des PME, pas plus qu’aux liquidités récemment acquises, à celles résultant de la vente de titres…».

Dans son projet de budget, le gouvernement Lecornu évoque une taxe «inspirée de taxes voisines en place dans plusieurs autres pays, comme les États-Unis et l’Irlande». Là encore, Gabriel Zucman s’inscrit en faux : «Aux États-Unis, ce sont tous les revenus des holdings qui sont taxés.» Il resterait alors «dans l’assiette» seulement certains éléments comme «des comptes bancaires dormants» ou des «voitures de course», ce qui représenterait une «infime fraction du patrimoine des holdings».

Les Français paieront-ils à la place des milliardaires ?

En somme, l’économiste juge que cette taxe sur les holdings exonérerait de nouvel impôt 95% de la fortune des milliardaires. Alors que la justice fiscale doit être «la clé de la stabilisation budgétaire et de l’apaisement politique», souligne-t-il, le projet de loi de finances «reste sourd à cet impératif», fustige l’économiste. Un constat cinglant partagé par la gauche. Même s’il a assuré que son parti, le PS, ne censurerait pas le gouvernement en l’état, Olivier Faure est allé dans le sens de Gabriel Zucman, jugeant également sur X que «ce que ne paient pas les milliardaires, tous les autres le paient à leur place.»