
Un engagement 365 jours sur 365, un «job» à part entière, sans aucun répit ou presque. C’est la réalité du quotidien des aidants, qui font souvent une croix sur leurs activités personnelles et leur vie sociale, parfois au détriment de leur santé, pour soutenir un proche en perte d’autonomie, du fait de son âge, de la maladie ou d’un handicap. Entre 9 et 11 millions de Français mettent ainsi leur propre vie de côté pour épauler un mari, un enfant ou un parent âgé. Et parmi eux, 76% ne bénéficient d’aucune solution de soutien, selon une étude de l’Agirc-Arrco, le régime de retraite complémentaire des salariés du privé.
Pourtant, leurs besoins sont nombreux : trouver une aide à domicile (66%) ou des solutions de répit (62%), financer un reste à charge (61%), être accompagné dans leurs démarches (59%) et disposer d’activités de bien-être pour se ressourcer (52%) figurent parmi leurs principales demandes. Autant de sujets sur lesquels les aidants peuvent être aiguillés, et obtenir un appui psychologique ou financier, comme l’explique Frédérique Decherf. Alors que la Journée nationale des aidants a lieu ce lundi 6 octobre, la directrice de l’Action sociale Agirc-Arrco présente les nombreuses solutions d’information et d’orientation pour ces publics trop souvent livrés à eux-mêmes.
Comment l’Agirc-Arrco œuvre-t-elle pour épauler les aidants ?
Frédérique Decherf : L’Agirc-Arrco est le régime de retraite obligatoire de tous les salariés du privé. Nous avons deux métiers. La retraite, tout d’abord, puisque nous percevons des cotisations et nous payons des pensions. Mais l’action sociale également, au travers de services d’accompagnement et de prévention, pour les actifs et les personnes âgées.
La première des orientations prioritaires de l’Agirc-Arrco est celle du passage à la retraite et de l’accompagnement des personnes âgées. La deuxième concerne les aidants et les personnes en situation de fragilité. Cette priorité aidant existe depuis 1993 : cela fait donc très longtemps que nous avons réalisé que pour aider les personnes à vieillir dans de bonnes conditions, il faut aussi aider les gens qui sont autour d’eux.
Selon votre dernière étude, un aidant sur deux ne sait pas où s’adresser pour être accompagné. L’Agirc-Arrco est-elle identifiée dans ce rôle ?
La moitié des aidants, qui sont entre 9 et 11 millions en France, sont en effet perdus. Et il serait bon que l’Action sociale Agirc-Arrco soit un peu plus connue, car, par nature, nous avons une mission d’intérêt général. Environ 97% de la population française a cotisé ou cotise au régime Agirc-Arrco. Notre périmètre d’action est donc très large et notre site internet Maboussoleaidants.fr est ouvert à l’ensemble de la population.
Mais oui, c’est une évidence : les aidants sont “perdus”. Il y a beaucoup d’informations partout et ils ont du mal à s’y retrouver. Pour un premier niveau d’information globale quand on est à l’aise sur le digital, nous recommandons le site Maboussoleaidants.fr pour avoir une première vision de ce qui existe autour de chez vous : un service de répit pour souffler un peu, un service de mobilité si vous avez besoin de trouver un mode de transport pour une personne âgée…
Si vous n’arrivez pas à trouver l’information qui vous concerne, nous avons mis en place un service téléphonique, «Ecoute, conseil et orientation», qui permet de prendre le temps et de réaliser un état des lieux de votre situation et de vos besoins. Ensuite, nous vous orientons vers les aides légales et les services propres à notre régime.
Un des principaux problèmes ne réside-t-il pas dans le fait que de nombreux aidants s’ignorent ?
Pour comprendre ce à quoi on a accès, il faut en effet réussir à faire la démarche de se sentir aidant. Il faut pouvoir se poser la question : “le soin que j’apporte à mon enfant en situation de handicap ou à mon parent est-il de l’aidance ?” Il est impératif de réaliser qu’à un certain stade, cela empiète tellement sur sa propre vie que l’on a besoin d’en parler, d’être accompagné. Organiser les rendez-vous médicaux, gérer l’administratif… C’est quasiment un job à temps complet.
Une fois que l’on a pris conscience de son statut, il faut parler à quelqu’un qui comprend ce que l’on vit. C’est la raison pour laquelle nous avons monté le service “écoute, soutien”, pour pouvoir échanger, en présentiel ou par téléphone, avec quelqu’un qui a connu une situation similaire. Les aidants ont besoin d’en parler, de dire ce qu’ils vivent et de savoir que quelqu’un les comprend, pour souffler, parler, vider leur sac, obtenir des conseils et des retours d’expérience.
«Prendre conscience d’être aidant, c’est accepter de prendre soin de soi»
L’écoute ne suffit pas toujours. Des solutions sont-elles proposées si la charge devient trop lourde ?
Parfois, les aidants n’en peuvent plus et sont en situation d’épuisement. Dans ces cas, le régime Agirc-Arrco propose des services de répit. Cela peut être une demi-journée pour que l’aidant puisse souffler, son parent est alors pris en charge dans un établissement spécialisé. Il peut aussi s’agir de séjours de répit un peu plus longs, avec l’assurance que la personne aidée reste dans une situation confortable.
Nous sommes très attentifs à proposer des solutions qui prennent en charge à la fois l’aidé et l’aidant. Nous essayons de développer des séjours vacances aidant/aidé, même si assez peu de structures sont à ce jour capables d’organiser cela. Nous avons également des formules de relayage ou de baluchonnage, qui permettent à des professionnels formés de venir à domicile, pendant quatre jours d’affilée, ce qui permet à l’aidant de partir quelques jours pour souffler.
Ces services sont-ils entièrement financés par l’Agirc-Arrco ?
Très majoritairement, oui, ils sont financés par le régime. Certains d’entre eux, à la marge, comme pour les aides financières, sont examinés en fonction de la situation de l’aidant et soumis à des critères d’éligibilité. Nous prenons en compte la composition familiale et les revenus notamment. Chaque année, depuis 1993, nous finançons entre 20 et 25 millions de prestations, et accompagnons environ deux millions de personnes, que ce soit par la communication d’informations ou le financement de services spécifiques.
Malgré les moyens déployés, plus de trois aidants sur quatre ne se font pas accompagner. Comment améliorer la situation ?
Avec la Journée nationale des aidants, notre objectif est de promouvoir le rôle de l’Agirc-Arrco mais surtout de faire prendre conscience à un certain nombre de personnes qu’elles sont des aidants. En prendre conscience, c’est accepter de prendre soin de soi, pour être encore meilleur dans la relation à l’autre.
Nous avons beaucoup de témoignages de personnes qui craquent complètement. De femmes surtout, qui doivent s’occuper de leur mari atteint de la maladie d’Alzheimer, de pathologies neurodégénératives très compliquées à gérer au quotidien. Contacter sa caisse de retraite Agirc-Arrco, c'est d'abord trouver une écoute, pouvoir se confier sur sa situation et être aidé, pour monter un dossier pour l’Allocation personnalisée d'autonomie (APA) par exemple, ou obtenir quelques conseils qui peuvent suffire. Notre message est que la solidarité familiale va jusqu’à un certain niveau, mais il faut impérativement éviter de s’oublier.
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