A la recherche de votre nouvelle résidence principale, vous venez de visiter un appartement qui vous plaît beaucoup. De là à déposer une offre dans la foulée, il y a un fossé, ou plutôt une nuit, susceptible de vous porter conseil pour un achat aussi conséquent. «Ne tardez pas, j’ai plusieurs autres visites cet après-midi…», vous glisse l’agent immobilier. Un conseil qui vous hérisse. Sans le savoir, vous faites partie des acheteurs identifiés comme «stables» par les agents immobiliers. «Le stable n’aime pas qu’on le presse», détaille Ronan Lebas, à la tête de l’Adresse de Prestige, l’enseigne que le réseau d’agences immobilières l’Adresse vient de lancer pour se positionner sur des transactions de 600 000 à 2 millions d'euros.

Le dirigeant se souvient ainsi d’un acquéreur potentiel, qui visitait un appartement en vente à 17 000 euros le mètre carré (!), dans le VIe arrondissement de Paris. «Il avait le coup de cœur mais il s’agissait de sa première visite et il en avait sept autres dans la journée», expose-t-il. Ronan Lebas a tôt fait de cerner le personnage, le type de client qui «sort du magasin parce que le vendeur lui a demandé s’il pouvait lui être utile». Après l’avoir laissé visiter tranquillement l’appartement, il s’est bien gardé de l’alerter sur le fait qu’il était loin d’être le seul intéressé, ce qui était au demeurant vrai : «Je ne l’aurais jamais revu, sinon.» Il a au contraire conseillé à ce monsieur d’enchaîner ses sept autres visites, puis de le rappeler pour lui dire s’il avait toujours un coup de cœur pour le premier appartement. «Il a fait une offre dessus le soir même», sourit Ronan Lebas.

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Un client «dominant» qui passe outre l’estimation de l’agent immobilier

Son épouse Stéphanie, qui développe avec lui l’Adresse de Prestige, a récemment eu affaire à un client dit «dominant». Le genre qui «a confiance en lui, aime prendre la parole et est très focalisé sur le prix», dépeint elle. Tout en «comprenant» l’estimation réalisée par l’agence, il n’a rien voulu entendre, désireux de «tenter le coup» d’un prix de vente manifestement trop élevé par rapport au marché. Résultat des courses, il a dû consentir à une énorme négociation de 500 000 euros ! Sur un bien de plus de deux millions, certes, mais tout de même… Beau joueur, «il n’a pas cherché à négocier à la baisse notre commission» histoire de rentrer un peu dans ses frais, se félicite Stéphanie Lebas.

Deux autres catégories d’acheteurs (et de vendeurs) existent. Le «conforme» et «l’influent». Au premier, «il faut tout démontrer par A plus B», explique Ronan Lebas. Inutile de lui vendre un quartier en mutation car telle entreprise devrait s’y installer dans tant d’années, c’est beaucoup trop vague ! Le second valorise les interactions avec autrui, il cherche des «expériences positives». «Dans le haut de gamme, certains clients sont capables de ne pas acheter parce que ça ne colle pas entre eux et l’agent immobilier», observe Stéphanie Lebas. Et de souligner «qu’on achète souvent en couple… L’agent doit parfois s’adapter à un dominant et à une conforme, par exemple !».

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Les codes de l’immobilier de prestige

Cette méthode dite DISC (Dominant, Influent, Stable, Conforme) n’est pas propre à l’immobilier mais elle lui est très adaptée, surtout sur le segment du prestige, selon Ronan Lebas. Elle fera donc partie des modules de formation que le couple est en train de développer pour ses futurs collaborateurs. Lesquels pourront être issus d’autres univers que l’immobilier, comme le monde de l’art, de l’événementiel ou encore de la gestion de patrimoine.

Quand on vend des biens à partir de 800 000 euros, à une clientèle qui s’estime en droit d’avoir certaines exigences, mieux vaut «savoir reconnaître une commode Louis XVI, une cuisine Bulthaup ou de l’électroménager Gaggenau», prévient Ronan Lebas. Et être incollable sur «l’impôt sur la fortune immobilière et la taxation des plus-values de cession !», complète son épouse.