L'arnaque sur laquelle revient France 3 Auvergne Rhône Alpes était difficilement décelable et l'offre affichée, on ne peut plus tentante : un SUV allemand à 24 990 euros, soit près de 10 000 euros de moins que la concurrence. Florent, entrepreneur près de Lyon, est immédiatement «hypé». Le numéro Siret du garage MRV Car’s existe, les avis affichent cinq étoiles et le vendeur parait professionnel. Ce dernier dit acheter les voitures par lots, d'où le prix bas. «Ça ne me rebute pas», balaie Florent. Après une visioconférence durant laquelle on lui montre le véhicule dans un garage de Valenciennes, Florent signe le bon de commande. Le 9 septembre, il verse la totalité du montant, soit 24 990 euros.
Le vendeur lui promet une livraison entre le 26 et le 29 septembre. Mais le jour venu, personne ne se présente. «Je tombe sur une messagerie saturée qui ne reçoit plus de messages. En cherchant sur Internet, je vois des avis à une étoile, avec des gens expliquant s'être fait arnaquer. Je suis aussitôt allé porter plainte à Vienne.» Florent découvre alors qu'il n'est pas seul : il crée un groupe Facebook privé où se retrouvent 43 victimes, pour un préjudice total estimé à 860 000 euros. Beaucoup s'étaient vu vendre le même véhicule fantôme. Selon le commissariat chargé de l'enquête, une soixantaine de plaintes ont déjà été déposées.
Une escroquerie bien rodée et difficile à poursuivre
Florent, depuis, tente toujours de récupérer son argent, versé sur un compte d'une banque de Valenciennes. Sa demande n'a rien donné. Les fonds étaient insuffisants, lui a répondu l'établissement. «Cet argent part certainement à l'étranger», avance Me Roelens, avocat parisien qui suit ces affaires depuis deux ans et met en cause le secteur bancaire : «Un compte contenant plusieurs centaines de milliers d'euros vidé d'un coup, c'est une opération suspecte. Il y a eu un manque de vigilance.»
Selon Me Julien Roelens, «ça repose sur un délai de deux ou trois mois durant lequel un garage se monte et bombarde Leboncoin d'annonces» avant de disparaître. L'avocat a déjà défendu des victimes de sociétés fictives comme Nove Car ou BS Auto, actives en 2023. Le scénario est toujours le même : «Ils multiplient les ventes avec des paiements de 20 000 euros en moyenne. Après commence une phase où la livraison est compliquée. Entre-temps, il rassure le client avec une copie de la carte grise. Et quand une date de livraison est fixée, c'est le black out», résume Me Roelens.
Une faille judiciaire
Ces escrocs profitent d'une faille judiciaire. «Le mode opératoire présente un avantage, il divise les plaintes dans l'espace. Prises individuellement, ce ne sont pas des escroqueries d'envergure, donc la justice ne perçoit pas l'ampleur du problème», déplore l'avocat. Il envisage désormais de déposer une plainte avec constitution de partie civile pour saisir un juge d'instruction. «C'est une arnaque très impressionnante en termes de perfectionnement. Ils sont capables de faire débourser 20 000 euros à n'importe qui, même à un chef d'entreprise.» conclut l'avocat.
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