«Nos parents vivaient bien mieux que nous». Cette phrase revient régulièrement dans la bouche des moins de 30 ans, confrontés à un coût de la vie qui semble toujours plus élevé. Mais est-elle vraie ? Une note publiée mardi 21 octobre par le Haut commissariat à la stratégie et au plan, chargé d’animer des travaux de réflexion pour l’Etat, apporte des éléments de réponse à cette question. Afin de tenter d’objectiver la situation des jeunes, l’étude compile ainsi des données couvrant les grands domaines du niveau et de la qualité de vie.

Premier enseignement, les moins de 30 ans ne représentent plus qu’un tiers des Français, contre un Français sur deux en 1975 (soit près de 2 millions de moins). S’ils sont moins nombreux, les jeunes sont en revanche bien plus diplômés qu’il y a 30 ans puisqu’ils sont un sur deux en moyenne à disposer d’un Bac+5, contre seulement un sur cinq dans les années 70.

En revanche, la note démontre que l’insertion professionnelle des jeunes s’est fragilisée ces dernières décennies. Ainsi, en 2023, 35% des actifs de moins de 25 ans sont en emploi et, parmi eux, seuls 43% occupent un emploi stable (CDI ou poste de fonctionnaire). Ils étaient 75% en 1982 parmi les 45% de jeunes en emploi. Cela s’explique principalement par un contexte économique qui s’est largement dégradé depuis les années 1970, avec un taux de croissance en berne et un taux de chômage élevé chez les jeunes, notamment chez les plus diplômés.

Les jeunes ont un salaire entre 11% et 13% plus élevé que leurs aînés

Reste à aborder la question principale : les jeunes vivent-ils mieux que leurs aînés ? La note rappelle que le PIB par habitant en 2024 est deux fois supérieur, en euros constants, à celui de 1975. Mais cette richesse ne s’est répercutée que partiellement sur les salaires nets. La hausse du chômage et le vieillissement de la population ont en effet nécessité le financement d’un système de redistribution, dont le coût a augmenté au cours des deux dernières décennies.

Pour autant, un jeune salarié ayant accédé à son premier emploi entre 2009 et 2011 percevait en moyenne, ses 10 premières années de carrière, un salaire net annuel 11% à 13% plus élevé que celui d’un jeune entré sur le marché du travail entre 1975 et 1980, en euros constants (corrigés de l’inflation).

Alors pourquoi un tel sentiment de déclassement ? Sûrement parce que dans la même période, les salaires ont progressé plus rapidement pour le reste de la population. Pour preuve, en 2019, le revenu moyen des 30-34 ans net des prélèvements obligatoires était inférieur de 13% à celui des 50-54 ans. En 1979 au contraire, il y était supérieur de 9%. «La position relative des jeunes, dans l’échelle des salaires, s’est donc dégradée», est-il souligné dans la note.

Un patrimoine concentré chez les plus âgés

Le sentiment de déclassement des moins de 30 ans peut également s’expliquer par une autre réalité. La note démontre en effet que le patrimoine s’est largement concentré chez les plus âgés ces dernières décennies. En 1986, le patrimoine individuel net médian des ménages de 30-39 ans représentait un peu moins de la moitié de celui des ménages de 50-59 ans. En 2021, il n’en valait plus que 28%.

A l’inverse, le patrimoine individuel net médian des plus de 70 ans valait seulement 36% de celui des 50-59 ans en 1986, il en vaut aujourd’hui 118%. Pour expliquer la hausse des inégalités de patrimoine entre les générations, la note souligne que «l’effort financier pour accéder à la propriété s’est considérablement accru au fil des années».