«Quand je bosse seul, et que j'ai les boules ? Je tape. Fort. Je tape tout ce qu'il y a dans mon frigo !» Johann, 36 ans, est rédacteur Web et copywriter. Il se venge des injustices dont il est victime sur le jambon serrano, les yaourts de brebis, le tzatziki, parfois un fruit, ou sur le paquet de granola du placard. «J'écris du "content marketing" pour de grandes marques. Elles sont exigeantes (capricieuses) et changent d'avis (des girouettes). Mais je ne peux rien dire, elles sont mon gagne-pain.» Avant, Johann pouvait pester : il coworkait. «C'était pratique, je trouvais une oreille charitable chez Romain, Emi ou Marcus, des gens qui n'étaient ni mes collègues ni mes rivaux. On se soutenait…» Après la perte d'une grosse collab, bye-bye le tiers lieu. Johann est rentré dans son 60 mètres carrés de la porte des Lilas et trépigne désormais seul, sur le tapis berbère de son salon...

Il n'est pas le seul. Le domicile devient le QG pro pour pas mal de monde. La France comptait 3,6 millions d'indépendants fin 2019 (1). Un phénomène boosté par les chiffres du statut (simple et catchy) d'autoentrepreneur (croissance de 18,5% en dix ans), eux-mêmes liés à l'ubérisation rugissante de notre doux monde digital. La crise pandémique, ses confinements, ses couvre-feux, ont accéléré le process. Et la fragilisation aussi de tous ces solopreneurs, hélas. Ils croyaient s'émanciper, ne plus être subordonnés à un cadre fixe (horaires, lieu), les voilà payés à la pièce, écrasés par une dure mise en concurrence.

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