On l’a surnommée «Madame Langage» et ça lui va bien. Jeanne Bordeau, linguiste et surtout styliste de la langue, conseille dirigeants et managers pour qu’ils maîtrisent leur expression, orale comme écrite. Elle a mis au point un «oraloscope», véritable audit des pratiques oratoires des entreprises françaises. Les résultats sont secrets, mais pas ses analyses ni ses recommandations. Ecoutez-la, même à l’écrit : on entend la musique d’une langue soutenue, nuancée et terriblement perspicace.

Les dirigeants s’expriment-ils correctement ou abusent-ils d’un salmigondis managérial ?

Jeanne Bordeau : Il y a une prise de conscience et des vrais progrès depuis la loi Pacte et l'obsession de la «raison d'être». Les dirigeants sont plus conscients que jamais qu'ils doivent mieux raconter leurs objectifs et que, compte tenu du foisonnement et de la confusion d'émetteurs, y compris dans leur entreprise, ils sont les porteurs de la cohérence. Pour autant, sont-ils tous dans une langue qui parle à l'autre de lui ? Pas forcément.

La plupart souffrent d'un péché d'intelligence, avec un discours qui reste assez macroéconomique et conceptuel. Or le public peut être très intelligent, mais son intelligence est concrète. L’un des défauts communs aux discours des dirigeants et managers, c’est par exemple le cruel manque d'analogies. Par une analogie, une comparaison, une métaphore, on peut être très évocateur. Ils ont le devoir de se faire comprendre, mais ils ne songent peut-être pas assez à ceci : «Qu'est-ce que l'autre a perçu de ce que je veux ?»

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