5 conseils pour emporter l’adhésion de votre auditoire lors de vos prises de parole au travail

Persuader, c’est aussi se mettre en scène, avec un visage ouvert et un corps exprimant dynamisme et confiance en soi. C’est en dégageant «quelque chose» de l'ordre de la conviction et de l'énergie qu’on incarne ses idées et qu'on mettra son auditoire en confiance. «Il faut rester ancré dans le sol pour se sentir confortable et en confiance. Cela montre que l’on est sûr de soi. Un talon non ancré dans le sol indique une position hésitante», rappelle Caroline de Laquintane, comédienne et formatrice à la prise de parole en public.

On évitera les postures arrogantes, comme bomber le torse de manière trop ostentatoire, mais surtout les postures dites de défaite ou de soumission, qui révèlent de la nervosité ou un manque de confiance en soi, comme les yeux baissés, les épaules tombantes et le dos courbé.

En pratique. «Le bon orateur est vertical dans sa posture, horizontal par le regard, explique Valentin Becmeur, coach en éloquence et vice-président de l’Association des formateurs professionnels en art oratoire. On évite l'excès de gestes et on privilégie ceux qui illustrent et soulignent les points importants.» Rendre un dossier béton ? Dessinez un carré avec vos mains. Eviter de tourner en rond ? Esquissez plutôt un cercle. Enfin, ne négligez pas votre tenue !

Soignez votre flow

«Sur scène, mes stagiaires mobilisent leur corps pour exprimer leur routine au travers de différentes émotions : agacé, triste, joyeux… Ça leur apprend que seul 7% de la communication est verbale, raconte Caroline de Laquintane. Pour apprendre à maîtriser sa voix, et la porter loin sans crier, on la pose sur le souffle expiré. Inspirer (temps pour préparer en silence les idées), puis expirer doucement les mots et les phrases.»

Pour créer du suspense, servez-vous du silence et… murmurez. «Chuchoter crée une sensation de confidentialité, explique Valentin Becmeur, tandis que les questions rhétoriques donnent du dynamisme à la parole.»

En pratique. Pour que le message soit retenu, on peut recourir à des figures de style, comme des rimes, des répétitions (de mots, de syllabes...), qui lui donneront des airs de dicton ou de slogan. Pensez aussi aux métaphores, car, souligne Valentin Becmeur, «le cerveau retient moins les mots que les images qui y sont associées».

>> Notre service - Trouvez la formation professionnelle qui dopera ou réorientera votre carrière grâce à notre moteur de recherche spécialisé (Commercial, Management, Gestion de projet, Langues, Santé …) et entrez en contact avec un conseiller pour vous guider dans votre choix

Captivez votre auditoire dès le départ

L’amorce d’un discours est essentielle : elle doit procurer une émotion, tout en restant courte pour transmettre de la spontanéité. «On débute avec une accroche en faisant allusion à ce dont on va parler, mais sans en dévoiler le fond», précise David Jarousseau. Optez pour une présentation courte dans un langage accessible et peu technique, compréhensible par un enfant de 12 ans. «L’idéal est de présenter toutes ses idées en vingt minutes, puis de consacrer le reste du temps à échanger avec les participants, recommande Christophe Mayen. Ça donne l’occasion de créer du lien, de valoriser le public.» Assurez-vous dans ce cas que votre interlocuteur vous a bien compris. Une simple question peut suffire : «Ce que je viens de dire est clair pour vous ?»

En pratique. Si la conférence doit impérativement être longue, Chritophe Mayen conseille cette petite astuce : rompre la dynamique toutes les vingt minutes, avec une question, un sondage ou une statistique étonnante, par exemple.

Soyez prêt à improviser !

Un PowerPoint qui ne fonctionne pas, quelqu’un qui remet en cause ce que vous venez d'affirmer… Mieux vaut être paré : «J’ai toujours en tête le plan classique du discours (exorde, narration, arguments, réfutation, finale), que j’adapte au sujet, avec des histoires et des anecdotes, et je reste en écoute active pour improviser, précise Caroline de Laquintane. Rebondir sur un mot est une des tactiques qui facilite l’échange d’idées. Dresser une liste de mots à l’avance sur les champs lexicaux du sujet aide à structurer un discours non prévu. Sur le sujet de la guerre, par exemple, ces mots seront puissance, militaire, arme, bataillon, char…»

Un bon orateur se démarque grâce à une bonne culture générale, du vocabulaire et une grande mémoire. Tout cela se travaille, en lisant la presse, la littérature ou en écoutant des podcasts, et permet d’adapter plus facilement ses arguments en fonction de l'auditoire. «Pour promouvoir une politique de tolérance zéro auprès des forces de l’ordre, un politicien utilisera un argument de sécurité publique. Face à l’opinion publique, il s’appuiera plutôt sur des faits divers marquants», illustre David Jarousseau.

En pratique. Faites preuve de souplesse : «Chercher à inspirer fonctionne toujours mieux que contredire et vous opposer, assure Valentin Becmeur. Si vous n'êtes pas encore parvenu à convaincre votre auditoire, être clair et droit dans vos bottes vous donnera une chance de le faire changer d’avis. Evitez l'opposition frontale, cherchez à comprendre la position de l’autre, questionnez-le, tant pour trouver ses points faibles que l'amener à remettre lui-même en cause certains points.» Une astuce ? Lancer des questions ouvertes et se taire ensuite, renvoyant ainsi la balle à l’auditoire. Enfin, parfois, il faut savoir se rendre à l’évidence : on ne peut pas convaincre tout le monde. Lâcher prise avec un sourire peut créer un espace pour développer un échange d’idées.

Garance Yverneau, fondatrice et CEO de Garance&moi (garance-et-moi.com), cabinet de conseil dédié à la carrière des femmes

“J’ai planté mes yeux dans ceux des spectatrices”

Il y a trois ans, on m’a demandé d’animer une masterclass dans le cadre d’un Forum féminin. Je devais expliquer en quoi la reconversion est un levier de carrière pour les femmes. L’événement présentait plusieurs offres de conférences et de coaching, il fallait donc parvenir à se distinguer. Tout d’abord, j’avais choisi une tenue dans laquelle je me sentais à l’aise, confortable. J’avais bien sûr soigneusement préparé mon discours, en n’écrivant que l’architecture et les transitions. Lors d’une précédente expérience où j’avais tout rédigé, à la virgule près, j’avais trop lu et ça s’était mal passé, les gens avaient décroché. Là, le squelette était prêt, mais laissait place à un peu d’improvisation. Le bon ingrédient a été de parler de mon propre parcours, de ce que j’ai vécu, avec beaucoup d’émotion.

J’ai décrit des scènes vécues, des anecdotes personnelles. Je voulais faire passer une notion d’authenticité, parler au coeur. J’ai planté mes yeux dans ceux des spectatrices, tourné mon buste pour intégrer tout l’auditoire, que je sentais captivé. J’avais l’impression de surfer, j’étais en maîtrise et cela m’a permis d’aller encore plus loin dans mon récit. C’était très agréable, grisant et stimulant. Je me sentais sur un nuage, ça doit libérer des endorphines ! Beaucoup de femmes sont venues me voir après, certaines ont même souhaité faire appel aux services de mon entreprise. Un souvenir hypergratifiant !»

Le décryptage d’Estelle Gentilleau, directrice du campus ISEFAC à Bordeaux, fondatrice des agences Semiramis et Les Bonnes Ondes

«Cet exemple illustre bien qu’avant la diction ou l’écriture, le premier travail à mener pour une prise de parole, c’est la connaissance de soi. L’enjeu est de construire une image sincère et authentique. Garance Yverneau comprend aussi qu’il faut se distinguer, s’affirmer. Etre aligné avec soi-même, c’est une première étape. Ensuite, il faut avoir un schéma narratif. Ici, elle utilise son histoire. Si l’on n’est que rationnel, factuel, on n’offre pas de point d’ancrage au public pour qu’il puisse se projeter. Il faut donc savoir quelle image on veut donner de soi, identifier le public et ses attentes, puis poser le message que l’on veut transmettre et comment on va l’incarner. Enfin, cibler l’objectif du discours, qui doit créer un désir d’action.»

Charlotte Baelde, conseillère régionale d’Ile-de-France, fondatrice et gérante de Kardinal Influence, agence de communication

“Si c’était à refaire, je serais encore plus dans l’émotion”

Dans le cadre d’une prise de parole sur l’égalité femmes-hommes dans la politique territoriale, je m’exprimais devant plus de 300 élus locaux, dans l’hémicycle de la Région. Je n’avais pas pu arriver en avance pour prendre le pouls de la salle, j’avais retouché mon discours la veille… J’avais l’intention de demander à l’auditoire de se lever pour soutenir les manifestions de femmes en Iran. C’était important pour moi, mais c’était un peu un coup de poker, car les élus ne se sentent pas particulièrement obligés de se lever un mardi matin, à 9 heures… J’avais mesuré le risque de bide total et je savais qu’il y avait un fort enjeu en matière d’image. C’est ce qui me stressait le plus ! J’avais aussi la pression de prendre cette initiative, car on ne représente pas uniquement soi-même dans ces situations, mais aussi la collectivité et sa présidente. Mais j’ai décidé de foncer, il y a une part de spontanéité.

J’ai demandé des encouragements pour les Iraniennes, et je me suis mise à applaudir, les gens m’ont suivie et se sont levés, pendant une minute. J’ai dû employer les bons mots au bon moment, sans doute avec la bonne intonation, car ça a bien marché. Si c’était à refaire, je serais encore plus dans l’émotion. Il faut réussir à embarquer son public. Ensuite, j’ai repris le fil et j’ai assuré mes dix minutes comme prévu. Mais ce moment, un véritable ascenseur émotionnel, m’a beaucoup touchée.»

Le décryptage de Vincent Le Bouder, expert en communication et coach certifié (vlbcoaching.com)

«Il y a eu une prise de risque, mais c’est intéressant de se laisser guider par son intuition. Cela peut valoir le coup quand on est porté par la situation, par ses valeurs. Pour être un bon orateur, il faut écouter et lire son public, faire corps avec lui, observer les signaux. Il faut se faire confiance, mais avoir préparé et répété est aussi important. Les questions clés à se poser avant toute prise de parole sont : à qui je parle, à quel titre, pour quoi, pour dire quoi, et comment ? Etre clair sur ces cinq points permet d’avoir une trajectoire. Enfin, d’un point de vue pratique, prendre le temps de repérer la salle, le cadre, est très important, pour ne pas être déstabilisé le moment venu.»