Peintres et électriciens sont sur le pont. Dès ce dimanche 1er octobre, de Besançon au Puy-en-Velay, en passant par Albertville, Tours ou encore Limoges, 61 magasins Casino vont changer de nom (3 vont connaître un décalage de reprise). Certains vont fermer durant pas moins de deux semaines, au cours desquelles les équipes devront changer l’enseigne sur la devanture ainsi que la signalétique intérieure, mais aussi remplacer les anciennes marques propres Casino par des jus de fruits Paquito ou de la charcuterie Monique Ranou, autant de labels appartenant aux Mousquetaires.

Peu courant dans le secteur, l’épisode illustre la pression inédite que l’inflation frappant les produits de grande consommation (+ 21% en deux ans) fait peser sur la grande distribution dans son ensemble. Face aux étiquettes qui flambent, les consommateurs modifient en effet radicalement leurs habitudes d’achat. De peur d’être tentés, ils fréquentent moins les hypermarchés ainsi que les rayons non alimentaires de Lidl, tandis que, pour économiser sur leur budget essence, ils s’en vont remplir plus souvent leurs paniers dans leurs supérettes de proximité. Tout en se privant de certains produits désormais jugés trop chers, au point que les volumes de vente des produits de grande consommation ont reculé de 4% sur le premier semestre.

Une déconsommation qui rebat sacrément les cartes: selon les panélistes, jamais les parts de marché des enseignes n’ont été aussi volatiles. «En cherchant à acheter moins et moins cher, les consommateurs chahutent le marché et font swinguer les positions des uns et des autres», confirme Emily Mayer, directrice des études pour l’institut Circana (ex-IRI). Chez les distributeurs, c’est même le champ lexical du chaos qui est convoqué pour décrire la situation: «instabilité», «désordre», «tsunami», «grand bouleversement»… «En volumes achetés, on constate des mouvements à plus 10% ou à moins 10%, il y a là un phénomène qui relève de la reconfiguration profonde des modes de consommation», alerte Philippe Brochard, le directeur général d’Auchan France.

Intermarché devrait inscrire son nom sur quelque 195 nouveaux magasins

Pour le spécialiste de la distribution Olivier Dauvers, la flambée tarifaire n’explique toutefois pas à elle seule le «big bang commercial» qui se joue sous nos yeux. «Les fondements de ce qu’on est en train de vivre sont structurels et déconnectés de l’inflation: d’abord la consommation ne progresse plus de façon mécanique comme ce fut le cas durant de nombreuses années. Le gâteau ne grossit plus, alors même qu’un convive supplémentaire, le commerce en ligne, s’est assis à table, et que les surfaces commerciales continuent de progresser, d’environ 1% chaque année», récapitule l’expert. Avant de conclure avec simplicité ce que certains dirigeants ont longtemps refusé d’admettre: «Tout cela produit des tensions qui mènent tôt ou tard à la disparition des faibles.»

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