Spécial numéro 400 : découvrez les rotatives qui impriment Capital

La presse n’est cependant pas la seule activité de Maury. Des millions de livres scolaires, de romans et de prospectus destinés à la grande distribution sortent aussi de ses lignes. Sur les quelque 120 millions d'euros de chiffre d’affaires, la presse magazine pèse 50%, le livre, 25%, et les impressions publicitaires, 25%. Bien que Maury continue de gagner des marchés (l'entreprise a récemment récupéré l'impression de Capital, de The Good Life et d'Ideat), le papier souffre, souvent remplacé par des alternatives numériques. Si les équipes profitent de la bonne santé de l'édition, elles doivent donc adapter leur outil à la décroissance des besoins de la presse et, surtout, à l'effondrement du marché des prospectus, qui représentait un quart de l'activité il y a peu. En moyenne, les volumes de Maury baissent de 5 à 7% par an, depuis dix ans. «Aujourd'hui, on imprime 300 tonnes de papier par jour, cinq jours par semaine, mais j'ai connu une période, au début des années 2000, où c'était 500 tonnes de papier par jour, sept jours par semaine», se souvient notre guide.

La première usine que nous visitons, celle de Malesherbes, illustre à elle seule le phénomène. Le site, qui constitue pourtant le berceau historique du groupe, s’apprête en effet à fermer. Déjà démontées, la plupart des rotatives ont été déplacées à 8 kilomètres de là, vers l’usine de Manchecourt, où toutes les activités seront regroupées au printemps. Pourtant, au milieu des lignes disparues, les effluves d’encre et de vernis continuent d’assaillir les narines des visiteurs. Une vieille machine de marque Bookomatic semble même ne jamais pouvoir s’arrêter, crachant un à un le dernier Ken Follett, dont les piles s’entassent progressivement sur les palettes. Sa voisine, une rotative offset 16 pages, tourne également à plein régime. Ce jeudi matin, c’est la couverture du prochain numéro de Capital qu’elle débite à vive allure.

«Arrêtez les rotatives !» : ici, l'expression prend enfin tout son sens

Placé à l’entrée du circuit de fabrication, l’épais papier est entraîné de cylindre en cylindre, à travers les différents blocs de couleur. La bobine défile de plus en plus vite. Si vite, que les mots choisis avec soin par la rédaction finissent par se mélanger les uns aux autres, dans une danse presque envoûtante. Mais à la sortie, patatras! Il manque des couleurs. Il faut stopper le processus, pour revoir le calage. «Arrêtez les rotatives !» Cette phrase lancée comme une ritournelle par les journalistes, dès qu’une grosse information tombe, prend ici tout son sens. Pour les opérationnels, «rouler n’est jamais une formalité», comme le signale Benoit Dumesnil, le chef d’atelier. Nombre d’exemplaires partent au recyclage avant que les bons réglages soient trouvés.

Et il faut garder l’œil sur l’horloge, notamment du côté des équipes du planning, chargées de jongler avec l’impression de chaque titre, hebdomadaires comme mensuels, dans les délais impartis. Une fois prête, la couverture de Capital rejoindra les pages intérieures du magazine, déjà imprimées la veille sur le site de Manchecourt, où l’ensemble doit encore être assemblé, collé, puis préparé pour l’expédition. Au total, il faut compter trois jours pour que soient confectionnés les 115 000 exemplaires de votre mensuel, qui sont d’ordinaire imprimés.

18 000 exemplaires par heure, c’est la vitesse d’impression de la machine qui produit les pages de Capital

Construit dans les années 1990, le site de Manchecourt a été plusieurs fois agrandi, jusqu’à atteindre 70 000 mètres carrés. Maury a investi 4,5 million d’euros pour y accueillir ses activités et les 450 salariés. Plus grand, plus moderne et plus rapide, il présente un autre visage du groupe. Fini la manutention inutile: les bidons d'encre circulent via un ingénieux réseau de tuyaux, tandis qu’une équipe de robots chargés de remplir les palettes a été déployée. «On bascule dans une autre dimension en matière de productivité», confirme Jean-Marc Piquet. Le fondateur du groupe, Jean-Paul Maury, est aux premières loges pour suivre ce mouvement. Bien qu’il ait confié les rênes de l’entreprise familiale à son neveu, Pierre-Antoine Laporte, depuis quelques mois, le patriarche de 79 ans veille toujours au grain. Le jour de notre visite, il était lui aussi en «calage» dans son nouveau bureau. Aux avant-postes pour voir le numéro 400 de Capital quitter l’usine. Et tous les suivants.

>> Retrouvez ici le diaporama complet de notre reportage chez Maury Imprimeur.