
En lançant à seulement 26 ans sa propre écurie, Antoine Griezmann pouvait se targuer d’avoir fait souffler un vent de fraîcheur sur le milieu hippique… Mais voilà que le buteur, retraité de l’équipe de France de football, a trouvé plus précoce que lui en la personne de Georginio Rutter. A seulement 22 ans, l’attaquant formé à Rennes et international Espoirs vient de créer sa structure d’une dizaine de pur-sang. Et rêve un jour de remporter le fameux Prix de l’Arc de Triomphe.
Les stars du football ont beau se mettre à la casaque, tout comme certains jeunes patrons d'entreprises, pour Guillaume de Saint-Seine, le président de France Galop, l’association en charge du développement de la filière en France (une seconde s’occupant des races de trotteurs), cela ne suffit pas. Son plan stratégique à cinq ans prévoit en effet de multiplier les événements destinés à faire revenir le public dans les hippodromes, en le rajeunissant. «Nous voulons remettre les courses dans le cœur des Français et améliorer l’expérience des spectateurs. Face à nous, la concurrence est forte, nous prenons place dans la compétition de la société des loisirs», explique le président, aux manettes depuis fin 2023.
Pièce maîtresse de sa stratégie : l’hippodrome de ParisLongchamp, rénové à grands frais voici sept ans et qui accueille depuis, de mai à juillet, les Jeuxdi, soit huit soirées en format afterwork à destination des étudiants et des jeunes diplômés. Au menu : food trucks, découverte du milieu hippique, DJ set et, bien sûr, tout un programme de courses. «Nous avons dû adapter nos habitudes car, en général, les départs ne se tiennent ni à heure ni à jour fixes. Et nous avons aussi décalé les horaires, pour pouvoir courir en semi-nocturne», décrit Guillaume de Saint-Seine. Pour intéresser une assistance pas forcément au fait du jargon des courses, des compétitions de pronostics sont organisées en parallèle des paris du PMU, avec des lots à gagner. A 10 000 entrées par soir, facturées selon l’horaire 9 ou 13 euros (avec un bon à parier de 2 euros inclus), l’événement est le plus souvent complet. Si bien que deux dates ont été ajoutées cette année, à la rentrée de septembre. «L’objectif est qu’après cette première expérience, les spectateurs reviennent. Et 91% d’entre eux en expriment le désir», assure Laurent Dupont, directeur commercial, marketing et exploitation de la structure, un spécialiste de sportainment venu de Paris La Défense Arena
Ces Jeuxdi ne sont d’ailleurs pas les seuls à participer au lifting : France Galop a aussi développé le concept de «L'Hippodrome en famille», avec 30 dates, souvent le dimanche, réparties à Longchamp et dans les quatre autres hippodromes dont elle a la charge (Deauville, Chantilly, Saint-Cloud et Auteuil). Accompagnés de leurs parents, les enfants grimpent pour des baptêmes de poneys ou assistent à des défilés de chevaux. «Nous espérons que les jeunes qui participent aux soirées afterwork puissent ensuite revenir, plus tard dans leur vie, mais cette fois aux dimanches en famille !», escompte Guillaume de Saint-Seine. Nouvellement créée, la commission jeunes de France Galop a en plus imaginé de proposer des brunchs familiaux, uniquement à ParisLongchamp. Et veut pousser la digitalisation de l’expérience. «Nous avons développé une application qui permet par exemple de découvrir, par un QR code, où se situe le rond de présentation (lieu où les chevaux sont présentés au public avant le départ de la course, NDLR)», explique Pauline Chehboub, éleveuse très suivie sur les réseaux sociaux et présidente de cette commission. Et comme il faut pouvoir faire le plein d’émotions, les écrans des hippodromes diffuseront désormais d’autres sports. «Ce sera par exemple le cas des compétitions de Formule 1 le dimanche», explique Pauline Chehboub.
En plus de participer au rajeunissement du public, évalué à 407 000 spectateurs l'an passé dans l'ensemble des cinq hippodromes, ces événements permettent à France Galop de percevoir de précieuses ressources propres. «Alors que nous organisons plus de 70 événements dans l’année, dont le Qatar Prix de l'Arc de Triomphe ou le Prix de Diane Longines, la dizaine de Jeuxdi pèsent déjà près de 30% de nos revenus de billetterie», détaille Laurent Dupont. Le millésime 2025 démarre d’ailleurs plutôt bien. «Nous sommes en avance sur les ventes d’entrées», indique Guillaume de Saint-Seine. Une tendance d’autant plus bienvenue que, depuis plusieurs mois, le montant des paris engagés auprès du PMU s’affiche en baisse, de 4%. La faute au ralentissement économique et au rebond du chômage, qui viennent contrecarrer les plans pour rajeunir l'âge moyen des parieurs. Cela n’augure en tout cas rien de bon pour France Galop, à qui le PMU reverse une quote-part de ces paris. L’association, après avoir réussi à équilibrer ses comptes pour 2024, tablait d’ailleurs sur un déficit d'une quinzaine de millions d’euros pour 2025. Et elle a même dû présenter, le 20 mai dernier, un plan d'économies, qui débutera dès le 1er juillet prochain. Si les investissements dans la conquête de nouveaux publics ont été préservés, les financements versés aux éleveurs de la filière (les "encouragements") seront eux rabotés de 3,6% dès cette année, et de 7% à partir de 2026. Mais, promis, pas de quoi gâcher la fête des Jeuxdi.
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