
Casquette sur la tête, serviette autour du cou, écouteurs dans les oreilles… Antoine, 35 ans, cadre commercial, règle sa machine pour une séance de course de 40 minutes sur un tapis roulant. Comme lui, vous êtes 10 millions de Français, soit 14% de la population, à vous être laissés séduire par l’abonnement dans une salle de sport. Pour vous appâter, les enseignes de fitness n’ont pas le choix : elles doivent afficher des tarifs au plancher pour être les plus attractives possible.
Sur ce point, avantage au géant néerlandais Basic-Fit, leader du secteur en France, côté à la Bourse d’Amsterdam, dont les abonnements démarrent à 25 euros. Tandis que chez son concurrent le plus proche, le groupe familial L’Orange bleue, basé à Rennes, il faut prévoir un minimum de 30 euros. Mais ces chaînes s’y entendent, ensuite, pour faire grimper la facture. L’accès à un fauteuil de massage ? Comptez 2 euros chez Basic-Fit. Le suivi de ses progrès ? Prévoir 5 euros chez l’Orange bleue. À ce jeu, L’Orange bleue surclasse son concurrent. L’enseigne dégage un chiffre d’affaires moyen de 400 euros par abonné et par an, contre 275 euros pour Basic-Fit.
Une facturation toutes les 4 semaines et non plus au mois
Mieux, on savait que la shrinkflation sévissait dans les rayons alimentaires… mais elle s’attaque aussi au fitness ! C’est ainsi que chez Basic-Fit et chez l’Orange bleue, les cotisations d’accès aux salles ne sont désormais plus prélevées tous les mois, mais toutes les 4 semaines. Ce qui, à chaque échéance, équivaut à deux à trois jours de pratique en moins. Et à treize prélèvements dans l’année, au lieu de douze… «Nos coûts ont fortement augmenté avec la crise inflationniste, alors nous avons opté pour cette pratique, initiée par Basic-Fit, à l’été 2024. Comme le prix facial reste inchangé, cette hausse est moins visible pour le consommateur», confesse Clément Collet, directeur du développement de l’Orange bleue.
Bien sûr, ces réseaux ont d’autres arguments à faire valoir que leurs prix. Basic-Fit, par exemple, se démarque par son accessibilité : ses salles ouvrent de 6 heures à 22h30 tous les jours, voire, depuis octobre dernier, 24h/24 dans 335 clubs du réseau. Mais les cours collectifs ne sont parfois accessibles qu’en distanciel. L’Orange bleue, à l’inverse, met en avant son riche catalogue de cours, baptisé Yako. «Il s’agit de notre propre marque avec des chorégraphies et des exercices élaborés en interne, renouvelés tous les mois», indique Clément Collet.
L'Orange bleue exclut les métropoles
Si ces deux concurrents ont prospéré si vite depuis la fin du Covid, c’est parce qu’ils se sont partagé le territoire. L’Orange bleue vise ainsi des salles de 500 à 800 mètres carrés, en zone périurbaine ou dans des villes de taille moyenne. N’espérez pas trouver un club de cette chaîne dans les centres-villes des métropoles. «Nous avons choisi des implantations où la concurrence est rare», reconnaît Clément Collet. Le développement de ce réseau se fait sur un modèle de franchise – ou plus précisément de licence de marque –, qui exige de l’exploitant indépendant de débourser 350 000 euros, dont 70 000 euros d’apport. Chez Basic-Fit, les salles, de 1 000 à 2 000 mètres carrés, sont gérées en propre, et en général installées dans des villes de plus de 30 000 habitants. On compte par exemple une trentaine d’implantations à Paris, et entre 5 et 8 à Lyon ou Bordeaux. «Cette centralisation garantit aux clients une uniformité parfaite du réseau», note Étienne Sebaux, directeur exécutif chez AlixPartners. Les avis postés sur Trustpilot semblent confirmer que cette stratégie est payante : alors que L’Orange bleue écope de nombreuses critiques (manque de chauffage ou d’entretien des équipements, problèmes de propreté), Basic-Fit est plus épargné.
Chiffres clés :
L’Orange Bleue :
400 salles en France
180 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024
400 000 abonnés
Basic Fit :
870 salles en France
500 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2023
2 millions d’abonnés
Source : sociétés
Le rouleau compresseur Basic Fit
Mais cette paix des braves ne devrait plus durer… Alors que, selon une récente étude Xerfi, Basic-Fit pourrait compter 1 200 clubs d’ici 2030, l’enseigne envisage de recourir à un format de franchise. «Nous n’excluons pas de venir nous implanter dans des petites villes de moins de 30 000 habitants», confirme Franck Poillon, directeur général France. Elle devrait donc marcher sur les plates-bandes de son concurrent, qui prévoit près de 45 inaugurations en 2025, notamment dans l’est de la France. «L’Orange bleue ne doit pas s’endormir. Si Basic-Fit décide d’ouvrir son réseau à la franchise pour le régional, ça pourrait lui faire mal», indique Étienne Sebaux. Et pas qu’un peu : selon Lauric Berthier, chargé d’études senior chez Xerfi, l’ouverture d’une salle Basic-Fit dans une zone géographique donnée signe en général la fermeture de trois clubs concurrents.
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