
Son nom est Bezos, Jeff Bezos ! Le milliardaire américain et fondateur du géant Amazon peut se féliciter d’avoir mis la main sur une des pépites les plus bankable du septième art, comme on dit à Hollywood. Ce jeudi 20 février, Barbara Broccoli la productrice historique de James Bond a provoqué un petit séisme dans le monde du cinéma en abandonnant la production de la franchise du célèbre espion aux studios de la Metro-Goldwyn-Mayer (MGM) rachetés en 2022 par Amazon. Ces derniers détenaient jusqu'ici le catalogue des films, sans avoir la main sur les personnages eux-mêmes. Barbara Broccoli (et son demi-frère Michael Wilson) partageront encore la propriété de la licence avec Amazon-MGM, mais cèdent définitivement au géant américain le contrôle créatif de 007.
Une machine à blockbusters
Les fans de cette saga aux 25 films, qui attendent toujours de connaître le nom du successeur de Daniel Craig, l’acteur le mieux payé pour incarner James (dans le dernier opus, Mourir peut attendre, son cachet s’élevait à près de 30 millions d’euros), ont désormais de quoi s’interroger aussi sur l’avenir de cette franchise, maintenant qu’elle est passée sous la coupe d’Amazon. Beaucoup gardent en tête le rachat des droits de Star Wars par Disney en 2012. L’exploitation massive de la série a noyé les inconditionnels de la Guerre des étoiles sous une cascade de nouveaux films, pas toujours jugés indispensables y compris par les aficionados d’aventures intergalactiques.
Car avec l’espion britannique, Amazon tient aussi une machine à blockbusters et une marque en or. En 2015 déjà, la London School of Marketing estimait à 13 milliards de livres sterling, soit un peu plus de 16 milliards de dollars actuels, le pactole cumulé par l’agent secret. Dans leurs calculs, les spécialistes britanniques, avaient d’abord pris en compte les 9 milliards de livres provenant des entrées du box-office. Ils y avaient ajouté 2 milliards de livres tirées des ventes de DVD et 2 autres milliards de livres tirés du merchandising.
A l’époque, les analystes londoniens n’avaient toutefois pas pu prendre en compte les revenus issus du film Spectre, sorti peu après leur étude en 2015, puis de Mourir peut attendre, le dernier opus diffusé en 2021. Soit 1,6 milliard de dollars supplémentaires, rien que pour les entrées de cinéma, sans compter les ventes de DVD et royalties obtenues de la vidéo à la demande, qui pourraient peser au moins 100 millions de dollars - à lui seul, la vente du DVD Skyfall par exemple, avait généré 95 millions de dollars en 2013. Ni les revenus additionnels tirés des partenariats avec les marques, qui généraient il y a dix ans déjà «80 à 150 millions de livres sterling par film», d’après les experts de l’école londonienne. Soit encore au moins 200 millions de dollars de plus pour les deux derniers films.
Une bière à 45 millions de dollars
Car James est un champion du placement de produit. Les voitures Aston Martin, les montres Omega, les cocktails à base de Martini et le champagne Bollinger restent associés à l’icône. Mais en dégainant le chéquier, le brasseur hollandais Heineken a réussi faire avaler quelques gorgées de bière à 007. Pour se faire une place dans le blockbuster Skyfall, l'industriel a déboursé 45 millions de dollars. Depuis, même les marques business to business (BtoB), ces entreprises qui n’ont aucun lien direct avec le grand public, convoitent le générique de la série. En 2021 par exemple, deux porte-conteneurs de l’armateur marseillais CMA CGM ont fait leur apparition dans une scène d’action de Mourir peut attendre.
Au total, selon les estimations de Capital le pactole amassé par l’espion préféré de Q, s’approcherait donc des 20 milliards de dollars (19 milliards d’euros) depuis qu’il s’est invité dans les salles obscures.
Les convoitises d'un promoteur autrichien
Mais ce diamant cinématographique sera-il lui aussi, éternel ? A ce jour, il continue d’attirer les convoitises, et pas seulement d’Amazon. A Dubaï, un astucieux homme d’affaires ambitionne de tirer lui aussi profit de cette fabuleuse manne. Son nom à lui, c’est Kleindienst – Josef Kleindienst. Ce magnat autrichien de l’immobilier entend exploiter une faille juridique pour s’autoriser à décliner la marque James Bond dans ses propres affaires.
Au motif que la marque James Bond n’aurait pas été exploitée commercialement depuis 5 ans, Josef prétend qu’il est en droit de réclamer sa révocation pour non-usage, conformément au droit des affaires. Il a donc intenté des actions en justice au Royaume-Uni et en Europe dans l’espoir de faire main basse sur toute une série d’appellations liées à l’agent secret britannique - James Bond 007, «James Bond World of Espionage», mais aussi la fameuse réplique «Bond, James Bond».
The Guardian, qui a dévoilé le premier ses intentions, soupçonne le milliardaire de vouloir faire de The Heart of Europe, le luxueux complexe touristique de luxe à 5 milliards de dollars qu’il est en train de bâtir au large de Dubaï, un repaire pour nababs en mal de Jamesbonderies. L’opportuniste homme d’affaires réclame à la justice le droit de s’accaparer la franchise pour adosser l’espion de sa majesté à toute une série d’activités, notamment dans ses restaurants, services de bar à cocktail et résidences des Emirats. Où l’on ignore encore dans quelles tenues seront autorisées à circuler les James Bond girls.



















